Causette

Grossesses de cinéma Une fabrique de monstres

SUR LES ÉCRANS, LE VENTRE A LA GROSSE TÊTE! C’EST EN EFFET L’UNE DES PARTIES DU CORPS SUR LESQUELLES LES SCÉNARISTE­S SE SONT LE PLUS EXCITÉS, SI L’ON EXCEPTE, BIEN SÛR, LES FILMS PORNOS, DONT LES ORGANES HUMAINS FAVORIS SONT AUSSI FRÉNÉTIQUE­MENT UTILISÉS

- ISABELLE MOTROT

Si, au cinéma, le ventre est souvent au centre des récits, c’est surtout en sa qualité de matrice. Nombreux sont les films « sociétaux » qui mettent la grossesse à l’honneur pour aborder des thèmes divers. Récemment, ont été évoqués l’avortement avec 4 Mois, 3 semaines, 2 jours, la grossesse chez les ados dans Juno ou 17 Filles et le déni dans 9 Mois ferme. Ont également fleuri une kyrielle de comédies autour des péripéties de la grossesse, de Bébé à bord à En cloque mais pas trop, filon sans fin de gags crétins et indigestes qu’on ne saurait trop déconseill­er aux femmes enceintes. Mais le domaine le plus… fécond, pour la verve créatrice des cinéastes, allant parfois jusqu’à l’exubérance la plus ahurissant­e, c’est le film d’horreur. Alors là, la matrice est malaxée dans tous les sens, y compris les plus métaphysiq­ues. C’est fou ce qui sort du ventre des femmes dans la tête des hommes (car en général, les scénariste­s sont des mâles) ! On ne peut pas, ici, faire la liste de tous les corps étrangers à la civilisati­on – répugnante­s créatures et autres monstres maléfiques – que les entrailles féminines cachent en leurs (fourbes) replis sur les écrans. Le ventre de la femme est le vecteur par lequel l’horreur vient au monde, c’est la porte qui s’ouvre au mal.

La production pléthoriqu­e du genre va du plus kitsch au plus sanglant, et on ne peut tout citer. Gardons trois références : Alien, bien sûr, série où la femme (et un homme, incidemmen­t) est la mère porteuse du mal, mais aussi son vainqueur. Plus loin dans le temps, on trouvera Le Village des damnés, dans lequel toutes les habitantes en âge de procréer sont inséminées en même temps et mettent au monde de beaux enfants terrifiant­s.

Quant à la référence absolue, le film qu’on n’oublie jamais et dont la force maléfique s’exerça au-delà de la fiction, c’est sans conteste Rosemary’s Baby, de Roman Polanski, sorti en 1968. Mia Farrow y interprète une jeune femme dont la grossesse est récupérée par une secte d’adorateurs de Satan qui souhaitent faire d’elle la mère de l’Antéchrist. Le film, un chef-d’oeuvre, lance la mode des thrillers sataniques. L’année suivante, Sharon Tate, l’épouse de Roman Polanski, enceinte de huit mois, sera assassinée par des membres de la secte christique de Charles Manson.

En résumé, si vous êtes enceinte, prenez plutôt un bon bouquin. Encore que…

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 ??  ?? 3. Alien. La quadrilogi­e, de Ridley Scott, avec Sigourney Weaver.
4. 17 Filles, de Delphine et Muriel Coulin. 1. Juno, de Jason Reitman, avec Ellen Page.
2. Rosemary’s Baby, de Roman Polanski, avec Mia Farrow.
3. Alien. La quadrilogi­e, de Ridley Scott, avec Sigourney Weaver. 4. 17 Filles, de Delphine et Muriel Coulin. 1. Juno, de Jason Reitman, avec Ellen Page. 2. Rosemary’s Baby, de Roman Polanski, avec Mia Farrow.
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