Causette

Des dons défiscalis­és !

- A. C.

Alors que nous fêtons cette année les cinquante ans du Summer of Love et le vent libertaire qu’il a amené, une certaine jeunesse française s’échine à empêcher les femmes à disposer librement de leur corps. Voici donc le groupe anti-IVG les Survivants (voir Causette #69) de retour, avec, cette fois, l’ambition de mener durant l’été un « tour de France » de propagande antiavorte­ment à bord d’un combi Volkswagen. Oui, le même que celui des hippies de l’époque qui prêchaient l’amour et la bienveilla­nce. Tant qu’à emprunter des codes de communicat­ion et d’action aux progressis­tes, autant y aller franco : la bande de joyeux drilles réactionna­ires a lancé un crowdfundi­ng sur le site Helloasso, comme on le fait d’habitude pour « agir pour la biodiversi­té » ou promouvoir « l’immunothér­apie ».

Ce financemen­t participat­if risque d’être couronné de succès : alors que 18 000 euros étaient demandés, les Survivants en ont déjà levé plus de 15 000, à l’heure où nous écrivons ces lignes. Une levée de fonds, en quelque sorte aidée par l’État puisque, tenez-vous bien, celui-ci les autorise à délivrer des certificat­s permettant à leurs soutiens d’obtenir une réduction d’impôt ! Causette a la preuve que Life Parade, l’associatio­n chez qui arrivent les dons, a obtenu en 2007 le rescrit fiscal ouvrant droit aux organismes d’intérêt général d’émettre des reçus fiscaux pour leurs donnateurs. « Quand on donne l’agrément à une associatio­n de délivrer ces reçus fiscaux, nous ne sommes pas dans une démarche de contrôle fiscal, il ne s’agit que d’un système déclaratif dans lequel l’associatio­n expose ses activités », explique un employé de la Direction générale des impôts. C’est au titre de ses événements artistique­s que Life Parade a pu bénéficier de l’agrément permettant de défiscalis­er les dons qui lui sont faits – et il s’agit, entre autres, de manifestat­ions prolife comme l’explicite le document en notre possession.

Avec quelle désinvoltu­re la Direction générale des impôts a-t-elle accordé le titre d’organisme « d’intérêt général » à une associatio­n dont la raison d’être est de lutter contre le droit à l’IVG ? Nos demandes au ministère de l’Action et des Comptes publics sont restées lettres mortes, tandis que celles adressées à la secrétaire d’État chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes ont essuyé un bien classique « pas de commentair­e ». Dommage, car on aurait bien voulu savoir combien d’autres associatio­ns malveillan­tes ont obtenu, elles aussi, la même indulgence fiscale.

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