l’été à la pa ge
Escapades, hommages, comédies, suspense et grands espaces : Causette vous aide à faire vos bagages avec les nouveautés du printemps à dévorer cet été.
Femmes puissantes
Sous le soleil ou face aux vagues, il y a des chances que vous entendiez parler de La Tresse : premier roman de la réalisatrice Laetitia Colombani (à la folie… pas du tout, Mes stars et moi), c’est un carton (inattendu) en librairie. Un succès mérité pour cette épopée de trois femmes sur autant de continents : Smita, une Indienne de la caste des Intouchables, Julia, Sicilienne travaillant dans un atelier de perruques, amoureuse d’un exilé sikh, et, enfin, Sarah, brillante avocate de Montréal frappée par un cancer – et un traitement qu’elle dissimulera par un jeu de coiffes. Trois héroïnes bientôt percutées par le destin, que Colombani va relier pour une célébration de la féminité et du courage contre des traditions et des discriminations sociales ou sexistes. Brossant subtilement ses fils narratifs, alliant fluidité d’écriture, propos efficace et portraits riches en dégradés, La Tresse unit littérature de propos et de divertissement.
La Tresse, de Laetitia Colombani. éd.Grasset, 224 pages, 18 euros.
Bonnes nouvelles
Nouvelle voix, encore, qui nous vient d’une chanteuse de folk : Robin MacArthur (écoutez son groupe, Red Heart the Ticker), dont Le Coeur sauvage est le premier livre. Profitez de l’été pour picorer une à une ces onze nouvelles, reliées entre elles par une unité de lieu : l’État du Vermont. Des histoires de fermiers, de routards, de jeunes rebelles ou de vieux hippies. C’est lumineux, verdoyant, humaniste et poétique. C’est un véritable album d’histoires, dans la pure tradition de ces nouvellistes américains qui savent gratter toutes leurs cordes – et les nôtres. Le regretté Elmore Leonard, quant à lui, était un nouvelliste et un romancier considérable. Quentin Tarantino lui-même adapta son Punch créole sous le titre de… Jackie Brown. Elmore Leonard était une gâchette hors pair du western, du polar et du roman d’action. Mort en 2013, à l’âge de 87 ans, cet écrivain a laissé quelques inédits, dont Charlie Martz et autres histoires, un recueil de huit nouvelles dans la plus pure veine minimaliste et burlesque.
Le Coeur sauvage, de Robin MacArthur, traduit de l’anglais (États-Unis) par France Camus-Pichon. éd. Albin Michel, 223 pages, 19 euros.
Charlie Martz et autres histoires, d’Elmore Leonard, traduit de l’anglais (États-Unis) par Pierre Bondil et Johanne Le Ray. éd. Rivages, 200 pages, 8 euros.
Double bombe
Paru en mai, De la bombe est un roman qui secoue et requinque. Ophélie, une jeune Française vivant à Istanbul, reçoit pour mission de commettre un attentat dans un luxueux hôtel. Amoureuse de son commanditaire, elle voulait juste lui prouver qu’elle en était une, de bombe. Au dernier moment, elle décide de déjouer les plans. La repentie se dévoile par le verbe : embrigadement, renoncement, furie amoureuse, c’est un long cri allant de la perdition à la densité psychologique, une quête d’intensité sur le fil de l’impermanence des choses. Cynique, provocant, mais aussi sensuel, cavalier et burlesque : une première oeuvre saisissante, écrite sans ronds de jambe et avec une vitalité marquante.
De la bombe, de Clarisse Gorokhoff. éd. Gallimard, 270 pages, 17 euros.
Modèle
C’est avec Ernest Hemingway que nous refermerons la valise. Ou, plutôt, avec ses quatre épouses, réunies par la main invisible de Naomi Wood dans Mrs Hemingway. Malicieux manège en quatre tours racontant chacun un mariage et une dissolution, en passant par la passion, le voyage, la tromperie et le remariage express. Du Montparnasse des Années folles à l’Espagne sous les bombes, de la French Riviera à Cuba, pour une composition inédite de la vie de l’immense écrivain. Mais Mrs Hemingway vaut également pour ses portraits de femmes : Hadley, Fife, Martha et Mary, qui viennent illustrer la vie du mâle amoureux, mais aussi une certaine évolution de la condition féminine.
Mrs Hemingway, de Naomi Wood, traduit de l’américain par Karine DegliameO’Keeffe. éd. Gallimard, coll. La Table ronde, 288 pages, 21 euros.