Causette

Miss à toutes les sauces

à TOUTES LES SAUCES

- Par Marguerite Nebelsztei­n

Imaginez un peu la scène : vous êtes tranquillo­u bilou à l’hippodrome (ne cherchez pas à comprendre pourquoi). Là, entre deux courses de chevaux, grosse surprise : on vous a réservé un défilé de pouliches en maillots de bain et tenues de soirées. À la fin de la performanc­e, le jockey vainqueur prend une photo avec la gagnante. Détrompezv­ous, vous n’assistez pas à l’élection de la plus belle bête au dernier Salon de l’agricultur­e… vous venez de découvrir le concept original de Miss Élégance Hippodrome Grand Ouest. Tout un poème. « Venez nombreux apprécier la beauté des courses associée aux séduisante­s candidates », promet sur Facebook Laurent Maroleau, l’organisate­ur de cet élégant méli-mélo de course hippique et concours de miss. Comment dire… quel est le rapport entre les chevaux et les femmes dans cette histoire, à part si on voit le tout comme un concours de bestiaux ? De qui parle le président de la Société des courses de Niort, Michel Moulin, quand il détaille ses exigences : « Les principaux critères du jury seront l’élégance, le sourire, le choix des tenues, la qualité des déplacemen­ts » ? Des juments ou des apprenties miss ? Il n’est évidemment pas le seul à s’aventurer sur ce terrain glissant, voire carrément casse-gueule.

Citons Miss Hippodrome France, concours auquel on peut s’inscrire de 17 à 27 ans. Après c’est fini, tu es périmée. Exigences d’âge, de taille… Coucou, les bouts de viande.

Et puis, citons encore Miss 24 Heures du Mans, organisé en collaborat­ion avec le journal Le Maine Libre depuis 2010. L’heureuse élue pourra « rencontrer les plus grands pilotes, déambuler dans les stands, [et d’] être sous les crépitemen­ts des photograph­es » . Les plus grands pilotes, ce sont des hommes. Ils auront lutté et sué durant vingtquatr­e heures pour le trophée : une photo avec la miss en minijupe. Des femmes, aux 24 Heures du Mans, inutile de dire qu’on n’en voit pas beaucoup. Sois belle, mais reste où tu es, loin de la performanc­e sportive.

Disons-le tout net : on a les boules. Les filles, on aimerait au minimum les voir dans les écuries automobile­s. À conduire des bolides si ça leur chante. Et les photos de miss systématiq­uement entourées d’hommes, du jockey au président du jury et à l’organisate­ur, en passant par le plus gros mangeur de boudin, ÇA SUFFIT. On salue d’ailleurs au passage Miss Foire au boudin de Monthureux­sur-Saône et toutes les reines du comice agricole.

C’est quoi, le problème des sportifs qui veulent absolument couronner leur performanc­e par l’exhibition d’une nana jeune, belle, mince, grande ? Et les hôtesses du Tour de France, on en parle deux minutes ? Rappelons qu’elles ont des pages Facebook dédiées, avec photos en contre-plongée pour bien voir sous leur jupe, où on peut lire : « Pour ceux qui regardent les étapes jusqu’à la fin pour admirer les hôtesses [et] qui aimeraient remporter la course pour pouvoir leur faire la bise » … C’est juste sale.

Quand va-t-on enfin voir ces femmes trophées disparaîtr­e ? La seule raison de leur existence, c’est l’appât du chaland. Un peu comme une boîte de nuit avec entrée gratuite pour les filles. Coincer du gibier pour chasseur en manque. Et fabriquer de la pouliche de génération en génération. La grande finale régionale de Miss Élégance Hippodrome aura lieu au mois d’août aux Sables-d’Olonnes. On a hâte.

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