Causette

Mise à l’air générale

Comme les chaussette­s blanches dans les claquettes de piscine, en 2017, le naturisme devient tendance. Il attire de plus en plus d’adeptes et va même jusqu’à draguer les millenials sur les réseaux sociaux. Décryptage d’un retour en grâce.

- Par Elvire Emptaz

Après avoir passé l’été dernier à débattre sur le port du burkini, c’est désormais l’extrême inverse vestimenta­ire qui nous occupe… le naturisme ! Si le port du tant controvers­é maillot de bain intégral ne concerne qu’une poignée de femmes, le naturisme touche, lui, 5 % de la population, soit 2,5 millions de Français *. Et alors que le reste du secteur a baissé en 2016, le tourisme dénudé a encore progressé (+ 6 %). Il génère un chiffre d’affaires de 350 millions d’euros et attire dans notre pays deux millions d’étrangers chaque année.

Le phénomène est tel que le Conseil de Paris a validé, pour la première fois, la création d’un espace naturiste dans la capitale, annoncé pour cet été, puis repoussé. « Nous déterminon­s actuelleme­nt si le fait d’autoriser le naturisme dans le domaine public relève des fonctions du maire ou du préfet, c’est l’unique cause du délai, nous explique Pénélope Komitès, adjointe à la maire de Paris chargée des espaces verts. Nous avons aussi pris le temps de trouver, dans le bois de Vincennes, un site discret, mais accessible. La demande est légitime, Paris est l’une des seules capitales à ne pas avoir ce type de lieux, que l’on trouve à Berlin, Stockholm, etc. Il y a eu quelques réticences, au début, mais aucune plainte n’a été déposée. »

Les fesses à l’air sur Instagram

L’évocation du naturisme convoque inévitable­ment un monceau de clichés. On a tous en tête l’image d’un vieux baba cool grisonnant, se baladant sur le sable vêtu de son seul bob. Sauf qu’aujourd’hui, 45 % des « culs-nus » ont entre 20 et 30 ans, comme Émilie, 24 ans, étudiante en école de commerce. « L’été dernier, mes parents, pratiquant­s depuis trois ans, nous ont invités, mon copain et moi, dans un camping naturiste. J’ai hésité avant d’accepter. J’ai aimé me baigner nue et surtout ne pas être jugée sur mon épilation ou mes formes ! Je compte recommence­r, mais dans un lieu interdit aux “textiles”. Car, dans ce lieu qui les tolérait, je n’ai pu éviter le regard insistant de touristes italiens qui ne jouaient pas le jeu. » Elle va donc grossir les rangs des 13,4 millions d’adeptes occasionne­ls.

Julien, 39 ans, journalist­e, est, lui, plus assidu. Membre de l’Associatio­n des naturiste de Paris, il rentre tout juste de la World Naked Bike Ride de Londres, une randonnée nue à vélo, apparemmen­t plus plaisante que douloureus­e... « J’avais 15 ans quand j’ai enlevé mon maillot de bain pour la première fois. Je ne l’ai jamais remis. Je pratique en vacances et dans l’année lors d’apéros ou de sorties à la piscine. Depuis mes débuts, le naturisme a énormément évolué, le piercing est toujours mal vu, mais la vieille garde autorise maintenant les tatouages. Les réseaux sociaux ont changé la donne. » Ils ont effectivem­ent facilité les contacts entre pratiquant­s et permis de renouveler l’image du naturisme. En témoigne ainsi, sur Instagram, le succès du récent challenge lancé par le compte @cheekyexpl­oits, qui consistait à poser les fesses à l’air devant un joli paysage.

Même les « influenceu­ses » sur les réseaux sociaux se spécialise­nt dans ce genre de cliché dénudé. Il existe désormais des forums et des sites de rencontres amoureux ou amicaux comme Truenudist.com, Vivrenu.com, Ohnaturist.com, ou encore Nudistfrie­nds.com qui, à lui seul, compte pas moins de 788 200 membres. Alors, cet été, tous nus et tous bronzés ? * Étude réalisée en France auprès de 835 personnes par le cabinet Protourism­e, en juillet et août 2015

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