Causette

Un homme, un vrai

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J’ai bien aimé votre article sur la « charge mentale », je trouve important que vous nous teniez au courant des derniers trucs à la mode : certains disparaiss­ent tellement vite qu’on n’a même pas le temps d’en prendre connaissan­ce ! Il y a des chances que la charge mentale ne dure pas plus que la défunte danse tecktonik, mais tant pis, j’adoooore les nouveaux concepts. « Charge mentale », c’est imagé, ça pèse ; on voit tout de suite la migraine de trois kilos dans le cerveau. Ça veut dire exactement la même chose qu’avoir « charge de famille », ou « prendre ses responsabi­lités », mais qu’importe, c’est plus moderne : ça « claque ». Ça fait un peu neuroscien­ces aussi, alors c’est efficace pour victimiser les femmes et culpabilis­er les hommes. L’autre jour, en passant devant une réclame pour la fête des Mères « maman, chef de clan », je me suis demandé quel était votre problème avec la charge mentale ? Qu’y a-t-il ? Vous n’en voulez plus ? Mais alors, pourquoi l’avoir réclamée pendant toutes ces années ? On dirait que vous tombez du ciel : n’aviez-vous pas compris qu’en exigeant les mêmes privilèges que les hommes, qu’en réclamant la charge de « chef de clan », vous auriez un surcroît de responsabi­lités ? Les féministes se sont battues pour que vous ayez le droit de travailler, de diriger, de voter, de divorcer, bref d’avoir des charges supplément­aires, et maintenant vous vous plaignez ? Mais de quoi, Ô chef de clan ? De la charge mentale d’avoir des enfants ? Un travail ? Un patron ? De voter ? De devoir négocier vous-même avec le banquier ? Il aurait peut-être fallu réfléchir avant (mais j’imagine que ça vous aurait encore « alourdies »). Et qui se soucie de notre charge à nous, les hommes, les vrais ? Croyez-vous qu’il soit si léger, si naturel, d’être sempiterne­llement flegmatiqu­e, rassurant et protecteur ? Croyez-vous que nous ne doutions jamais ? Et que dire de celle d’être viril et séduisant ? D’être un vainqueur dans la course de la vie ? De devoir vous satisfaire sexuelleme­nt sans jamais faiblir, encore et encore, et de vous donner d’immenses orgasmes successifs, même quand on pense à quelqu’un d’autre ? Du poids terrible de la panne qui pèse en permanence sur notre virilité ? Le supporteri­ezvous seulement une minute ? Et celui de ne jamais refuser un défi ? De répondre à l’injure ? De trouver LE cadeau qui écrase la concurrenc­e pour la Saint-Valentin ? Vous demande-t-on de les partager avec nous, ces charges-là ? Et celle de tenir l’alcool en public, hein, qui y songe ? Il en va finalement de la charge mentale des femmes comme du reste : à la fin, c’est toujours un problème de poids. Les femmes souhaitent pouvoir manger sans grossir, avoir des responsabi­lités sans perdre leur légèreté d’esprit et faire des enfants en restant sexy. Bien sûr, ça ne marche pas, alors elles se vengent… sur nous. Il faut pourtant choisir, les filles, vous ne pourrez pas tout avoir ; c’est le moment de devenir adultes, un peu. Moi aussi, je suis passé par là, courage. Bien à vous, Éric, un homme, un vrai

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