Un polluant made in France !
Puisqu’on nous empêche de polluer chez nous, allons gaiement le faire chez les pauvres ! L’interdiction, en France, d’utiliser l’atrazine, un pesticide qui défonce l’écosystème des rivières, n’enraye pas les exportations françaises du produit vers d’autres pays. Ukraine, Soudan, Pakistan, Chine et Azerbaïdjan : selon les données de l’Agence européenne des produits chimiques, tous ces pays ont pu bénéficier, en 2017, de l’expertise française en matière de désherbant-plus-toxique-tu-meurs (sur le coup). Ce petit commerce est directement chapeauté par l’État français, puisque les entreprises exportatrices de ce genre de produits chimiques ont pour obligation, selon la réglementation européenne, de notifier chaque export à leur autorité nationale. C’est l’ONG helvétique Public Eye qui a lancé, en mai, une campagne d’information sur ces exportations sulfureuses, qui concernent également la Suisse et d’autres pays de l’ouest de l’Europe. En ligne de mire, Syngenta, multinationale suisse qui produit des semences et des pesticides, règne en maître sur le marché de l’atrazine et pourrait ne pas respecter les conventions internationales en la matière. Présent un peu partout dans le monde, le mastodonte ne produirait pas, selon nos sources, la molécule d’atrazine en France, mais au Royaume-Uni. Le produit final serait, en revanche, préparé chez nous, en toute opacité – à l’abri des feuillages cultivés à l’engrais maison – puisqu’on ne dispose, pour l’instant, d’aucune information sur les quantités et le chiffre d’affaires que cela représente. Et, après tout, à quoi bon se priver ? « L’atrazine est autorisée dans soixante pays, dont les États-Unis. Nous avons tout à fait le droit de l’exporter », a rétorqué, droit dans ses bottes, le porte-parole de Syngenta au Monde. Quant au ministère français de la bien nommée écologie solidaire, contacté par Causette, il n’a pas daigné expliquer pourquoi il laissait se perpétuer, à l’aise Blaise, la fabrication d’un pesticide que la France a interdit depuis 2001. Ni, donc, l’empoisonnement des sols et des habitants de si lointaines contrées.