« D’autres formes de plaisir » pour les hommes
Félix Dusseau est sociologue spécialiste des questions d’amour et de sexualité, diplômé de l’université de Bordeaux et futur doctorant.
CAUSETTE : Après #MeToo, un mouvement de fond est en marche pour repenser les rapports femmes-hommes, notamment sexuels. Comment cela se traduit-il chez les hommes ?
De même que la féminité, la FÉLIX DUSSEAU : masculinité est une construction sociale. Avec #MeToo et même avant, depuis que le féminisme influe sur notre société et que l’on admet le désir féminin, certains hommes se posent des questions sur leurs rapports avec les femmes et changent leurs pratiques relationnelles et sexuelles en faisant plus attention à l’autre. Chez d’autres, cela crée un questionnement angoissé sur comment se comporter et une sincère perte de repères. Imaginez que vous jouez à un jeu de société et que, d’un coup, les règles changent : c’est le même effet. Et cela peut aller jusqu’à la radicalisation de certains, comme la communauté des « incel », ces « célibataires involontaires » et masculinistes. On est dans l’ordre de la crispation sexuelle identitaire, telle qu’observée par le philosophe Michel Foucault.
Est-ce que le féminisme peut profiter à la sexualité masculine ?
Repenser sa relation aux femmes per
F. D. : met à un homme de se libérer de certaines contraintes exigées par la norme virile ! C’est aussi s’ouvrir à d’autres formes de plaisir. Pour la petite histoire, je me souviens avoir discuté avec une vendeuse dans un magasin de sextoys qui m’assurait que les premiers acheteurs de godemichets étaient des couples hétéros et pas, comme les représentations de la sexualité entre femmes nous le font croire, des couples lesbiens. Pour accompagner ce progressisme féministe qui influe doucement, il est nécessaire que des hommes prennent la parole pour dire quelles influences bénéfiques cela a eu dans leurs rapports avec les femmes ou dans leur sexualité.
Les adolescents que je rencontre dans le cadre de mon travail sont ouverts à ce genre de discours. En général, ils le comprennent et le prennent bien. Ce qui est dommage, c’est que, contrairement à ses obligations légales, l’institution scolaire ne leur fournit pas suffisamment de clés concernant l’éducation sexuelle. Pourtant, eux sont prêts à entendre ce discours progressiste.