“On a chacun une marraine et un parrain”

Arthur, 8 ans, Antoine, 6 ans, fils d’Isabelle (Suisse)

Arthur et son petit frère, Antoine, sont les enfants d’Isabelle, mère célibataire. Tous deux sont nés du même donneur anonyme via une insémination, en Espagne. À 41 ans, Isabelle espère avoir un troisième enfant en solo.

Arthur

« À Noël, moi, mon petit frère Antoine et maman, on a été à Barcelone, car maman veut encore un bébé. Je pense que c’est très cool. On a pris l’avion, puis on est allés à l’hôtel où nous avons été gardés par une baby-sitter pendant que maman allait à la clinique. Elle a mis des graines dans son ventre. Comme pour moi. Avec maman, on en parle. Je lui pose des questions, elle me montre des vidéos, on est bien ensemble. Elle est rigolote, ma maman, on fait plein de choses comme faire du ski, on va à la piscine, on part en camping. Nous partons en vacances avec d’autres enfants. Mon frère et moi, on a aussi chacun une marraine et un parrain. Le mien, on l’appelle Tonton Yogi, comme l’ours du dessin animé. Je le vois souvent, il vient à Noël, aux anniversaires. Même si je ne suis pas trop “foot”, je joue avec lui pour lui faire plaisir, car lui il aime jouer, et moi, je l’aime beaucoup. Je le vois comme un membre de ma famille. À l’école, quand mes copains me posent des questions, je réponds que mon papa est un donneur anonyme, que c’est un monsieur qui donne une graine et que je ne connais pas. Pour qu’on arrête de me poser la question tout le temps, j’ai demandé à maman qu’elle l’explique à la maîtresse. C’est donc “à moitié” un secret, car je n’ai pas envie d’en parler à tout le monde. Les copains qui savent me disent que j’ai du bol de ne pas avoir de papa. De toute façon, je préfère garder ma maman pour moi. Parfois, à l’école, je regarde le père des autres enfants. Je me demande : “Comment est le mien ? Est-ce qu’il est rigolo ? Est-ce qu’il est sérieux ?” Même si je n’aimerais pas avoir un papa (tous les jours), j’aimerais le voir, le connaître, plus tard. Avec mon frère Antoine, on en parle très peu, car lui, il dit que notre papa est mort. »

Antoine

« Oui, moi, quand on me demande qui est mon père, je dis qu’il est mort. Je préfère ne pas dire que c’est un donneur anonyme. Souvent, je l’imagine, je l’ai même dessiné, un jour, à l’école. Sur le dessin, il a un ventre qui prend tout le salon. Parce qu’il est gros, mon papa ! Gros à exploser, il prend toute la place. J’ai gardé le dessin dans la boîte où il y a mes photos. En fait, j’imagine mon papa comme mon arrière-grand-père qui est sur une des photos, dans la boîte, et qui est mort lui aussi. »