LES HÉROS DE LA FRONTIÈRE
SUR LA ROUTE
Depuis son premier livre, en 2000, l’écrivain américain Dave Eggers nage dans un océan de récompenses et de succès. C’est mérité. Lauréat du Médicis étranger, adapté au cinéma (Away We Go), cet écrivain éblouit par ses fresques humanistes et modernes. Alors quand on apprend que, pour son prochain livre, il se met dans la peau d’une mère de famille au volant d’un camping-car en Alaska, on trépigne d’impatience. On aurait tort de se priver. L’histoire, c’est celle de Josie, dentiste de 40 ans dont les crises de vie et d’alcoolisme frisent souvent le tragi-comique. Accablée par des procès de patients, un ex-mari fouineur, tiraillée entre des élans d’aventure et de fatigue, elle décide de plaquer la civilisation pour entraîner ses deux enfants, Paul, 8 ans, et Ana, 5 ans, dans un voyage initiatique – et irresponsable – sur les routes les plus dangereuses du monde. Que fiche-t-elle ici ? Elle n’en a pas la moindre idée. Résultat ? On frôle le bonheur littéraire. La rencontre espérée entre Kerouac et Little Miss Sunshine n’a pas lieu. Mais notre écrivain a du métier. Son art de décrire des paysages cristallins et magiques, bien que souvent carbonisés, à travers le regard désenchanté de son héroïne et la naïveté adorable des enfants offre une bouffée d’air qui ne se refuse pas. Dave Eggers, « héros des frontières » littéraires, n’atteint pas la force de ses précédents livres. Mais il nous maintient bien attachés à l’arrière de ce poids lourd, captivés par la détermination brinquebalante de Josie et de ses deux enfants courage.
Les Héros de la frontière, de Dave Eggers. Traduit de l’américain par Juliette Bourdin.Éd. Gallimard/coll. Du Monde entier, 400 pages, 24 euros. Sortie le 8 novembre.