Causette

LE ROI DU PAF

Une femme qui bosse et un homme père au foyer (PAF), pour Benjamin Buhot, 42 ans et deux enfants, ce modèle fonctionne. Depuis onze ans, à Andé (Eure), il partage son expérience sur le blog Till The Cat.

- É. L. B.

« Au départ, j’avais besoin d’un pseudo pour aller me renseigner sur les forums de grossesse. J’ai pris le nom de mon chat. Puis, comme je voulais raconter mon expérience, j’ai ouvert un blog. Ça a commencé comme ça, il y a onze ans. Père au foyer [PAF, ndlr], c’est un choix de vie que nous avons fait conjointem­ent, mon épouse et moi : c’est elle qui travailler­ait. Avec une clause : si ça ne convenait plus ni à l’un ni à l’autre, on changerait de modèle.

Quand j’ai commencé, j’étais considéré comme un pionnier, mais plus maintenant. Tant mieux ! Mes deux filles ont aujourd’hui 11 et 13 ans. Bien sûr, à l’époque, je n’étais pas le seul PAF, mais comme j’avais un blog, j’étais un peu plus visible que les autres. Je dépendais financière­ment de mon épouse, mais, de fil en aiguille, j’ai repris une activité profession­nelle via le blog et l’écriture de livres* sur mon expérience. J’ai aussi développé d’autres compétence­s : je donne des conseils déco, bricolage, recyclage, cuisine. Financière­ment, je ne suis donc plus uniquement père au foyer.

J’ai expliqué très vite à mes filles que la situation était un peu originale par rapport aux autres familles. Mais pour elles, c’était naturel que papa vienne les chercher, leur prépare à manger ou leur fasse faire les devoirs. Mon éducation a joué : ma mère m’a rapidement appris à me débrouille­r et mon père – malheureus­ement décédé avant que je sois papa – n’a jamais été dans les stéréotype­s de genre. Il n’y avait pas de sexisme de son côté. Être père au foyer n’a jamais entamé mon rapport à la virilité et ma femme ne m’a jamais dit “va bosser feignasse !” [rires]. Je suis féministe par la force des choses, surtout en tant que père de deux filles, même s’il m’est arrivé de me faire rejeter par certaines [rires].

J’ai vite eu conscience de faire changer les choses, et peut-être même le monde, oui ! J’ai la sensation que mon choix fait réfléchir les autres, notamment les hommes, qui me posent plein de questions. Quant aux femmes, c’est important de leur montrer qu’il y a des hommes qui s’engagent dans cette voie-là. Afin qu’elles aussi puissent se dire que c’est un modèle possible. La première chose à faire pour que ça change, c’est observer, dialoguer, témoigner et, surtout, préparer ses enfants à aborder un monde difficile. Je rêve d’un futur dans lequel les filles n’auraient pas à se battre pour avoir 20 % de salaire en plus et ne se sentiraien­t pas menacées dans la rue. C’est ça mon idéal. »

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