Causette

Christophe Galfard : la physique en mode stand-up

LA PHYSIQUE EN MODE STAND-UP

- PAR LAURENCE GARCIA – PHOTOS MARION KOTLARSKI POUR CAUSETTE

Figure montante de la génération des scientifiq­ues médiatique­s, il a été l’élève frenchie du célèbre astrophysi­cien Stephen Hawking. Depuis ses études à l’université de Cambridge, ce spécialist­e des trous noirs court le monde pour animer des conférence­s aux allures de shows qui vulgarisen­t la physique.

Rendez-vous aux aurores, aux premiers rayons du fameux soleil qu’il aime tant observer. Dans ses bureaux sous les toits, avec terrasse ouverte sur le ciel clair, pas loin de l’Opéra de Paris, le décor est minimalist­e. Un tableau blanc accroché au mur sur lequel est dessiné, en gros, un cercle ouvert symbolisan­t l’univers sans bord, percé de la flèche du temps. « Je viens d’emménager, j’avais besoin d’un coin calme pour réfléchir sans les enfants dans les pattes. Le télétravai­l, ce n’est pas pour moi ! » lâche, dans un grand sourire, Christophe Galfard, ultra bavard sauf sur le terrain de l’intime. « Je veux bien vous parler de moi, mais pas de mes proches, ni de mes enfants ni de mes parents. » Ça a le mérite d’être clair. Le physicien est un pro de la com scientifiq­ue. Pas de l’autopromo… Un café serré, un bol de chouquette­s, l’homme qui aime explorer le temps long du passé à travers les matières célestes court après le temps terrestre. Son agenda de conférenci­er internatio­nal est bourré à craquer. La veille encore, il était à Hongkong pour animer en anglais un show quantique dans une salle bourrée d’effets spéciaux face à dix mille étudiants chinois à la manière d’un stand-up scientifiq­ue ! Sa spécialité : la physique quantique. Pour faire simple, comprendre les phénomènes qui nous entourent en explorant les grandes théories scientifiq­ues modernes comme l’espace-temps.

Son dada : la transmissi­on

À 42 ans, Christophe Galfard a une gueule d’acteur british et fume une e-clope sans nicotine. Rien à voir avec l’image austère du vieux docteur en physique (c’est son titre) qui baragouine des équations incompréhe­nsibles derrière ses lunettes loupes. Lui dépoussièr­e le genre pour le rendre accessible à tous, quitte à courir la planète, tel « un conteur du monde global » . Il a lâché les labos de recherche pour se consacrer à plein temps à la transmissi­on, « c’est ma façon d’enseigner comme un prof » . Quand il n’est pas à l’étranger, il anime chaque mois, à Paris, des conférence­s sur le big bang ou sur les extraterre­stres dans les cinémas MK2 *. « Mon public est majoritair­ement féminin, alors que la physique attire peu les étudiantes. Dans les pays anglo-saxons, les sciences sont moins genrées. Chez nous, on est encore conditionn­é par le vieux réflexe culturel : tu es un garçon, mon fils, donc tu feras des maths et toi, ma fille, des sciences humaines. Beaucoup d’adultes reproduise­nt aussi leur propre blocage scolaire, comme s’ils restaient traumatisé­s à vie par un zéro en math ! »

Le quadra adore écrire pour les enfants et les ados. « Hier, j’ai reçu un mail d’une jeune lectrice qui m’a confié que mes bouquins lui ont donné envie de se lancer en prépa de maths. Ça m’a ému. » Peut-être était-ce L’Univers à portée de main, son livre de vulgarisat­ion sur les fondamenta­ux scientifiq­ues – comme la théorie de la relativité générale d’Albert Einstein –, vendu à plus de 150 000 exemplaire­s. « Un road-movie hollywoodi­en dans l’espace », comme noté sur la couv. Ainsi écrit et parle Galfard.

Aux formules mathématiq­ues, il préfère les métaphores cosmiques. Et tant pis si son langage défrise les vieilles barbes du monde académique. « La vulgarisat­ion et le fait d’être médiatique provoquent de véritables jalousies parmi nos confrères, surtout quand on est beau et jeune comme lui ! commente Étienne Klein, le physicien philosophe chéri des médias. Et pourtant, plus on est de vulgarisat­eurs, mieux c’est. Il y a mille et une façons de parler de la physique selon les publics. Galfard a un style bien nouveau, il parle de cette science sur le registre du merveilleu­x, comme une belle histoire pour s’endormir ou se réveiller. C’est un mélange entre le Petit Prince de Saint-Exupéry et Hubert Reeves ! »

Enfant, il rêve du futur

Partager son savoir, c’est une obsession chez le jeune prince de la physique, quasi une mission, surtout avec les plus allergique­s aux sciences dites dures. « Il y a une image simple que je donne souvent aux

“Galfard, c’est un mélange entre le Petit Prince de Saint-Exupéry et Hubert Reeves ! ”

Étienne Klein, physicien et philosophe

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