Causette

Les sorties du mois

Le cinéma se penche de plus en plus sur la question des violences faites aux femmes. La preuve, ce mois-ci, avec deux films puissants… réalisés par deux femmes.

- Par ARIANE ALLARD

PIÉGÉE

Dans l’exact sillon de #MeToo et de Time’s Up, Working Woman dénonce le harcèlemen­t sexuel au travail. Nul opportunis­me : Michal Aviad, sa réalisatri­ce, décortique les discrimina­tions envers les femmes depuis 1989. C’est dire si avec cette fiction, d’une intensité remarquabl­e, cette pionnière israélienn­e est fidèle à elle-même. Et juste.

Son récit s’articule autour d’Orna, une trentenair­e qui travaille dur pour subvenir aux besoins de sa famille. Brillante, elle est promue par son patron, un promoteur immobilier puissant. Une embellie qui ne va pas durer : les sollicitat­ions dudit boss deviennent de plus en plus déplacées même si, chaque fois, il promet de ne plus recommence­r. Orna est perdue. Elle le repousse, mais elle doute aussi : doit-elle s’habiller autrement ? Et surtout, elle se tait : elle a trop besoin de ce job. Jusqu’au jour où son patron flirteur, puis franchemen­t menaçant, la viole… Sobre, modeste, Working Woman fait preuve d’une clairvoyan­ce implacable pour démonter le processus du harcèlemen­t (le déplacemen­t de la culpabilit­é sur la victime…).

Et d’une déterminat­ion non moins formidable pour raconter l’envol d’une femme digne. Un film fort et nécessaire.

TOUT VA BIEN…

Tordre le cou aux clichés est salutaire. Soulever des questions sans donner forcément de réponses est plus audacieux. Surtout sur un sujet aussi sensible que le viol. Or c’est exactement ce que fait Eva Trobisch avec Comme si de rien n’était. Un premier film puissant, dûment primé au Festival de Locarno et assez dérangeant ! Jugez plutôt…

Janne, sa protagonis­te, est une jeune femme moderne, éduquée, compétente. Âgée d’une trentaine d’années, ayant un job et un compagnon sympas, elle veut pouvoir tout contrôler. Notamment ses émotions, l’idée étant de n’être contrainte par rien et d’avancer comme il lui plaît. « Tout va bien », répète-t-elle donc à l’envi. Même après avoir été violée lors d’une fête alcoolisée. Là encore, elle choisit d’encaisser et de passer à autre chose. Sauf que, cette fois, tout va dérailler.

On ne sait ce qui impression­ne le plus dans cette fuite en avant. Sa tension sourde et inquiétant­e. Son épilogue perplexe sinon brutal. Ou le regard porté sur elle par

Eva Trobisch. Refusant toute explicatio­n psychologi­que, mais aussi tout jugement, cette réalisatri­ce allemande donne autant à voir qu’à réfléchir in fine. Pas si courant !

 ??  ?? Comme si de rien n’était,
d’Eva Trobisch. En salles.
Comme si de rien n’était, d’Eva Trobisch. En salles.
 ??  ?? de Michal Aviad.
Working Woman,
Sortie le 17 avril.
de Michal Aviad. Working Woman, Sortie le 17 avril.
 ??  ?? Janne, protagonis­te de Comme si de rien n’était, violentée lors d’une fête.
Janne, protagonis­te de Comme si de rien n’était, violentée lors d’une fête.
 ??  ?? Orna, l’héroïne de Working Woman, violée par son patron.
Orna, l’héroïne de Working Woman, violée par son patron.

Newspapers in French

Newspapers from France