Lori Lightfoot : Yes, she can !
L’annonce de sa victoire a fait le tour du monde. À 56 ans, elle est entrée dans l’Histoire comme la première femme noire lesbienne à la tête de la troisième plus grande ville des États-Unis. À la veille de son investiture, le 20 mai, la nouvelle maire de Chicago, Lori Lightfoot, a accordé une interview à Causette.
Dans un stade bondé, le lundi 20 mai, après la prestation d’un orchestre jouant au violon At Last, de la chanteuse Etta James, Lori Lightfoot, veste bleu clair sur les épaules, monte enfin sur la scène de l’arène Wintrust, à Chicago (Illinois), acclamée par des centaines de partisans. Des prières et des bénédictions d’un imam, d’un rabbin, d’un prêtre et d’une pasteure émaillent la cérémonie. À ses côtés, son épouse, Amy Eshleman, leur fille de 11 ans, Vivian, ainsi que sa mère, ses frères et ses soeurs.
Alors qu’elle n’avait jamais candidaté à une élection auparavant, Lori Lightfoot a été élue avec 74 % des voix pour ce scrutin municipal. Si elle vit aujourd’hui à Chicago, elle a grandi dans l’Ohio, où ses deux parents se sont connus après avoir déménagé du Sud ségrégationniste, où ils avaient passé leur enfance dans les années 1920. Son père, ancien agriculteur, fut, par la suite, à la fois concierge et barbier, et sa mère travaillait comme secrétaire médicale.
Avocate et procureure, Lori Lightfoot a été à la tête d’une task force (groupe de travail) pour réformer la police, créée par le précédent maire, fin 2015, à la suite du meurtre d’un adolescent noir, Laquan McDonald, par un policier blanc. Le premier policier de la ville, en service, à avoir été reconnu coupable du meurtre d’un Noir américain. Elle a alors produit un rapport d’enquête sur les morts en garde à vue, sur les allégations d’usage excessif de la force et sur le racisme systémique, qui gangrène la police de Chicago.
Lors de son discours d’investiture, elle a rappelé ses valeurs et s’est engagée à rendre Chicago « plus forte, plus juste et plus prospère », et à débarrasser la ville de la corruption et de la violence.
Malgré les applaudissements, les habitant·es de Chicago n’oublient pas les problèmes endémiques de la ville. Certain·es adoptent donc la position du « wait and see » (on attend de voir) sur les actions de la nouvelle maire. C’est le cas de Keymani Hill, jeune homme noir de 22 ans, membre de l’association Black Workers Matter : « Je suis là aujourd’hui, car c’est un moment historique de voir une femme lesbienne noire à la tête de la ville. Elle veut créer une école de policiers supplémentaire, alors que, selon moi, elle devrait ouvrir de nouvelles écoles pour les enfants. Mais on sera là pour le lui rappeler. » April Sanders, une policière noire de 37 ans, est venue avec ses parents et sa fille Summer, âgée de 8 mois. Elle est optimiste : « Je crois que si une personne peut faire bouger les choses, c’est elle. Elle souhaite vraiment en finir avec la ségrégation, donner de meilleures écoles à nos enfants. Elle veut aussi réformer la police et on en a besoin. On doit faire un meilleur travail dans les quartiers sensibles, être plus juste et équitable. »