Les gougères d’Olympe
C’est en Bourgogne, chez une vieille tante veuve, les volets tirés pour échapper à la canicule, un guignolet sans glace à la main, que vous avez découvert les gougères ? Celles-ci honorent l’autrice Olympe de Gouges, pionnière du féminisme et de l’abolition de l’esclavage, frondeuse pour avoir préféré, à la fin du XVIIIe siècle, le veuvage au remariage, seule condition d’accès au statut de femme libre.
1. Mise dans l’ambiance
Née à Montauban d’un père noble et académicien qui ne vous reconnaîtra jamais, mariée de force à un boucher rustre et vilain, plus enclin à confectionner du boudin qu’à vous faire couler un bain, vous allez finir veuve, puis sur l’échafaud… Donc autant vous servir un guignolet direct et, au lieu de vous mettre la tête dans le four (ou sous la guillotine avant l’heure), préchauffez ce dernier à 210 °C.
3. Cuisson
Tapissez une plaque de papier sulfu beurré. Avec deux cuillères à soupe, faites des boules de pâte pour former les gougères. Badigeonnezles avec un jaune d’oeuf, enfournez et laissez cuire jusqu’à ce qu’elles soient dorées comme la jeunesse que vous auriez dû avoir et gonflées comme votre ego de politicienne.
2. Préparation
Dans une casserole en cuivre, versez 25 cl d’eau non potable de Paris, 60 g de beurre coupé en morceaux, le sel et portez à ébullition. Versez la farine et remuez énergiquement jusqu’à ce qu’une boule de pâte se forme et se détache des parois. Hors du feu, incorporez 4 oeufs un à un en mélangeant bien, ajoutez les 3 cabécous coupés en dés, le comté râpé et un tour de moulin à poivre.
4. Pendant ce temps
Quand bien même vous vous sentiriez obligée, ce n’est pas en 15 minutes que vous allez tricoter des pantalons pour les sans-culottes. En revanche, ôtez la vôtre de culotte… 15 minutes, ce sera bien le temps qu’il vous faudra pour dégrafer votre corset. Puis, faites-vous couler votre bain hebdo qui vous vaut, entre autres, la réputation d’être une courtisane. C’est vrai qu’être sale, moche, remariée et muette vous aurait sans doute évité tant de scandales.
5. Dégustation
Les gougères sont prêtes et deux options s’imposent. Comme elles se dégustent tièdes, savourez-les dans votre bain, façon Marat (dont vous fustigez la violence révolutionnaire), un verre de guignolet à la main (toujours), un pamphlet à peaufiner dans l’autre. Ou parce qu’elles se conservent aussi quelques jours, en veuve libre, filez direct au Café Procope rejoindre Condorcet, vous emparer de l’espace et de la parole publiques avant que Robespierre ne vous envoie à l’échafaud. Rassurez-vous toutefois, prédestination olympienne du nom de femme publique que vous vous êtes inventé (acte subversivement féministe pour l’époque), vous finirez sans doute au Panthéon.