Réforme scolaire : les profs au piquet
« Sois prof et tais-toi », ironisent-ils en manif. Depuis quelques mois, les enseignant·es qui contestent un peu trop fort le projet de loi pour une École de la confiance – censé être adopté avant l’été – se font vertement taper sur les doigts. Comme Sébastien Rome, directeur d’école et adjoint au maire à Lodève (Hérault), qui a osé le critiquer dans une tribune au Monde, puis sur France Bleu, mi-mars. Deux semaines plus tard, il était convoqué par l’inspection académique et recevait une « lettre d’admonestation ». « Un avertissement qui ne dit pas son nom, mais qui constitue une véritable sanction puisqu’il a été versé à son dossier individuel », estime son avocat, Me Luc Moreau, qui a lancé un recours hiérarchique auprès du ministre de l’Éducation nationale… et vient d’obtenir le retrait de la lettre.
Pendant ce temps-là, au Havre, une directrice d’école a eu la mauvaise idée d’envoyer un mail contestataire aux parents d’élèves, à partir de son adresse professionnelle. Ni une ni deux : le 26 avril, elle a reçu un blâme et a été poussée à demander sa mutation avant le 3 mai. « Elle a commis une erreur, mais cette décision est tout à fait disproportionnée », dénonce Francette Popineau, du syndicat SNUipp-FSU. Et d’évoquer un climat délétère où, de « manière plus silencieuse », les pressions vont bon train : « Les enseignants qui critiquent l’institution sur les réseaux sociaux sont convoqués. Beaucoup d’inspecteurs exigent qu’ils décrochent les banderoles que des parents accrochent devant les écoles, en les menaçant parfois sur leur développement de carrière. Les plus zélés demandent même aux directeurs de transmettre les noms des parents mobilisés contre le projet de loi », dépeint-elle. Confiance, vous avez dit confiance ?