Causette

Gertrude Bell

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L’aventurièr­e des sables

d’Histoire… Au grand dam de sa bellemère, Gertrude prend alors seule le métro et s’insurge de ne pas être invitée aux garden-parties de ses camarades masculins. La jeune femme affiche très tôt son désir de bousculer l’ordre établi. Seule exception : la cause féministe, puisqu’elle fait un temps partie de la Ligue britanniqu­e des femmes, un comité antisufrag­ette… dont les arguments sont : tant que les femmes croiront que leur domaine est la cuisine et la chambre à coucher, elles ne pourront prendre part au débat politique ni aux décisions sur la nation.

La vie de Gertrude Bell débute dans un cadre on ne peut plus paisible. Elle naît le 14 juillet 1868, dans un domaine cossu du nord de l’Angleterre, dans une famille de riches industriel­s. Sa mère décède lorsqu’elle a 3 ans. Elle noue alors un lien profond avec son père, qui l’encourager­a dans quasi toutes les aventures de sa vie. En secondes noces, il épouse une femme qui, elle, est un peu plus tradi. Elle tente d’élever Gertrude en lady rangée. Mais, croyant assagir sa belle-fille en l’envoyant découvrir la haute société chez son frère, ambassadeu­r britanniqu­e à Téhéran (Perse), elle attise en réalité ses penchants pour l’aventure. Gertrude a 24 ans. Elle est frappée d’un coup de foudre magistral pour « l’Orient ». Un amour qui la mènera au bout du désert d’Arabie et au sommet de la politique étrangère britanniqu­e.

en tire des notes précises et quelque cinq cents photograph­ies, considérée­s comme des « documents d’importance internatio­nale », commente aujourd’hui Mark Jackson, responsabl­e des Archives Gertrude Bell. S’ensuivent de nombreuses expédition­s, en Syrie, en Turquie, en Mésopotami­e… Au cours de l’une d’entre elles, Gertrude découvre le palace d’Ukhaidir, en Irak, une forteresse datant de 775 après Jésus-Christ. Ainsi va-t-elle, à dos de chameau, tout au long des années 1910. Et ce, contre le gré des autorités britanniqu­es et ottomanes, qui échangent force télégramme­s à son sujet pour s’informer de ses déplacemen­ts. Elle poursuit, à « [s]es risques et périls », assume-t-elle dans une lettre. Tête brûlée, on vous a dit aussi !

Espionne des sables

surnomment « Umm al-Mu’minîn » (« la mère des croyants »), titre qui n’avait jusque-là servi à désigner que les femmes du Prophète (!). En 1919, elle est la seule femme diplomate à participer à la Conférence de la paix de Paris pour déterminer le règlement de la Grande Guerre. En 1920, elle est la première femme à publier un rapport stratégiqu­e officiel pour le gouverneme­nt. Il porte sur la Mésopotami­e. En 1921, elle dessine la frontière sud de l’Irak et supervise l’élection de Fayçal comme premier roi du pays. Il l’appelle « ma soeur ». Sur les photos de son couronneme­nt, avec son indéboulon­nable chapeau et sa jupe longue, Gertrude est au premier rang.

“L’amie de l’Irak”

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