On nous prend pour des Quiches !
COWORKING, COLIVING, COCONNERIE
Un lieu pour « entrepreneurs, free-lances ou start-up[eur·euses] », avec « ambiance télétravail » garantie, où chacun·e peut « brainstormer en chaussettes » et trouver « une source d’inspiration pour [ses] projets les plus ambitieux ». Si vous imaginez, en lisant cette description, une énième pépinière pour boîtes montantes qui se veut cool, vous êtes à côté de la plaque. Bienvenue dans une « hackerhouse » ! Un appartement, généralement géré par une start-up, destiné au « coliving et à la colocation ». Le modèle, déjà bien connu aux États-Unis, est en train de s’implanter en région parisienne où une dizaine de hackerhouses ont ouvert, regroupant jusqu’à dix-huit colocataires. On ne s’y satisfait pas du balcon ou de repas tranquilles en communauté, façon auberge espagnole. On vous promet plutôt de vous confronter à « des parcours étonnants, des projets ambitieux » (oui, encore) afin d’améliorer vos performances pro, en vous encourageant à ne pas prendre de pause déj ou de jour off.
Certaines offres indiquent que « lancer sa start-up » est une « condition obligatoire » pour y habiter. Et dans ce logis des plus modernes, si vous n’êtes pas au top niveau ménage (enfin, « cleaning », comme on dit là-bas), « on [vous] blâme sur Slack », un logiciel de discussion en théorie créé pour le milieu pro, indique une offre d’appart. Comme les habitant·es des hackerhouses sont voué·es à un avenir fulgurant dans le milieu de la tech, du business ou des data, on mise sur leurs futurs revenus et on leur demande entre 500 et 850 euros par mois pour vivre dans des dortoirs collectifs sans intimité, façon auberge de jeunesse à 10 balles la nuit. Il faut faire preuve de « motivation » et « être capable de sortir de sa zone de confort », justifient les offres d’appartement. Zone de co-quoi ?
Nan mais pincez-nous, on rêve. La première réunion du Beauvau de la sécurité – consultation d’ampleur consacrée à la police et à la gendarmerie pour tenter de lutter contre les violences policières et la défiance de la population qui en découle – s’est tenue le 8 février. Son thème ? Police et population. Invité·es ? Des responsables de la police nationale et de la gendarmerie, des syndicats de policier·ières, des parlementaires, des maires, des expert·es… Mais aucun collectif citoyen ou représentant de la société civile ! Ah si, pardon : « La seule association conviée, Raid Aventure, n’est du reste pas tout à fait étrangère à l’institution puisqu’elle organise notamment des “journées sportives et citoyennes encadrées par des policiers bénévoles” », note Le Monde.
On ne se foutrait pas un petit peu gentiment de nous, là ? Mohamed Mechmache, responsable du collectif AClefeu, créé après les émeutes de 2005, évoque avec retenue pour Le Monde « un rendez-vous manqué ». De fait, sans vigie citoyenne pour exposer le ressentiment de la population face à des violences policières systémiques, cette première réunion a accouché de propositions fumeuses relevant du pur exercice de communication. En effet, pour « adapter [la police] à la société de l’image », Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, souhaite « des séries télé » façon Bureau des légendes, qui renvoie une bonne image de la DGSI. Génie.
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En novembre dernier, Carambar annonce la fermeture de son usine historique de Marcq-en-Baroeul, dans le Nord, d’ici à la fin de l’année. Pas de panique, la marque aux célèbres caramels mous rassure immédiatement ses cent quatorze salarié·es : tous et toutes les ouvrier·ières seront « reclassé·es » à 10 km de là, sur le site voisin de Lutti, qui appartient à Carambar & Co depuis 2018. Mais, loin d’être le ticket d’or de Willy Wonka, c’est plutôt une rage de dents qui attend les employé·es. En effet, ces dernier·ières vont perdre dans le déménagement jusqu’à 22 % de leurs primes. Pas de blague Carambar, ici, mais « un tour de passe-passe », selon les syndicats, qui ont invité les salarié·es à débrayer. Car, dans la législation, un transfert d’activité se réalise avec les contrats de travail existants et ne devrait donc pas entraîner de baisse de salaire. De quoi prouver que, non, les bonbons ne sont pas uniquement composés de sucre. Parfois, ils contiennent aussi une grosse pincée de mauvaise foi.
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