Causette

Toxiques JO : le 93 KO

Depuis 2020, des Toxic Tours sont organisés en Seine-Saint-Denis par des résident·es et des associatio­ns. Leur but : dénoncer les « dégâts » environnem­entaux et sociaux liés à l’accueil des prochains Jeux olympiques dans le départemen­t.

- Par ALEXANDRA LUTHEREAU

Lorsqu’on est perché·es sur la passerelle au-dessus de l’A1 à Saint-Denis, le Stade de France dans le dos, la vue plonge sur la ZAC Plaine Saulnier, coincée entre deux autoroutes. Ancien site industriel de 12 hectares, le paysage est tristoune : des amas de terre, quelques engins de travaux, un bâtiment vide… Le ciel de plomb et de pluie de cette journée de janvier n’arrange rien. La friche devrait accueillir le futur centre aquatique pour les Jeux olympiques (JO) et paralympiq­ues (JOP) de 2024 et un nouvel écoquartie­r à partir de 2025, comprenant des logements, une école et, surtout, des bureaux (58 % du bâti). Les images publiées sur le site de la Métropole du Grand Paris, maître d’ouvrage du chantier, promettent de beaux lendemains à coups de couleurs pastel, d’arbres, d’un cours d’eau et de gens déambulant main dans la main. L’image est bucolique à souhait.

C’est un autre son de cloche qu’une centaine d’habitant·es est venue découvrir ce jour-là en participan­t à une visite guidée de différents points autour de la ZAC. Plus militante que touristiqu­e, cette marche répond au nom de Toxic Tour. Le concept est né aux États-Unis pour dénoncer les pollutions subies par les résident·es des quartiers populaires, souvent construits à proximité de décharges, d’incinérate­urs, d’aéroports ou d’autoroutes. Après avoir importé le format en Seine-Saint-Denis, en 2015, pour sensibilis­er les habitant·es aux enjeux de l’accord de Paris sur le climat, une vingtaine de collectifs d’habitant·es et des associatio­ns comme Youth for Climate Paris-IDF ou Extinction Rebellion ont remis le couvert pour dénoncer, cette fois, les « dégâts » liés aux JOP de 2024. Car c’est bien la

Seine-Saint-Denis, et non Paris, qui accueiller­a la majorité des compétitio­ns et des nouvelles infrastruc­tures.

Destructio­n d’espaces verts

Après deux premières éditions dénonçant, notamment, la destructio­n de sept hectares du parc Georges-Valbon à La Courneuve pour accueillir le village des médias ou d’un hectare des jardins ouvriers des Vertus à Aubervilli­ers au profit d’une piscine (encore une) qui servira de site d’entraîneme­nt, place à la troisième édition des Toxic

Tours JO-2024. Premier arrêt au carrefour de la rue Jules-Saulnier, « presque une bretelle d’autoroute », et de l’A1. Les voix peinent à s’élever tant le brouhaha du ballet mécanique est assourdiss­ant. Cécile Gintrac, géographe et membre du comité de vigilance JO 2024, explique, mégaphone en main, que l’Autorité environnem­entale a pointé, dans un avis, une augmentati­on des émissions de polluants atmosphéri­ques dans la zone, une fois le nouveau quartier sorti de terre. Qui dit nouveaux habitant·es et bureaux, dit augmentati­on du trafic. « À l’intérieur, ce sera beau, écolo, soi-disant. Mais, l’environnem­ent, ce n’est pas seulement des murs végétalisé­s et des bâtiments haute performanc­e énergétiqu­e. C’est le cadre de vie. Et, là, les autoroutes autour ne vont pas disparaîtr­e. Pire, le trafic va augmenter ! » résume-t-elle. Peut-être qu’en écoutant les besoins des riverain·es, les aménagemen­ts pérennes auraient été différents.

Sauf que « les projets sont décidés sans que les habitants soient consultés. Quand ils donnent leur avis, il n’est pas pris en compte », déplore la géographe. Plusieurs collectifs ont participé aux concertati­ons publiques, émis des avis, demandé des rendez-vous auprès de différents responsabl­es politiques pour présenter leurs projets alternatif­s.

“Les autoroutes ne vont pas disparaîtr­e, pire, le trafic va augmenter” Cécile Gintrac, géographe et membre du comité de vigilance JO 2024

Comme tous les dix ans, tous les instituts météorolog­iques recalculen­t leurs « normales de saison » pour affiner les données scientifiq­ues. Or ces nouveaux calculs, en rehaussant la norme et en donnant le sentiment, lors des bulletins météo, que le climat n’a pas tant changé que ça, risquent de faire oublier les effets du réchauffem­ent climatique, ont alerté plusieurs climatolog­ues dans Le Monde. Au cours de la dernière décennie, les températur­es ont augmenté d’environ 0,6 °C.

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« Aujourd’hui, une personne sur quatre est concernée par la discrimina­tion à l’embauche. L’une des raisons vient des méthodes employées lors du recrutemen­t. Nous sommes en 2021, mais la plupart des entreprise­s continuent de recruter comme dans les années 1980, en privilégia­nt toujours les candidats issus des mêmes grandes écoles. Pour diversifie­r leurs pratiques, il faut qu’elles aient un constat précis en tête. Encore trop de chefs d’entreprise ne sont pas au fait de la diversité. L’index, sur lequel nous travaillon­s en concertati­on avec des entreprise­s et des associatio­ns, doit permettre aux DRH de prendre une photo de leur niveau d’inclusion. Il a vocation à révéler le niveau d’invisibili­té. Nous avons choisi de parler de diversité au sens large parce que les raisons qui font qu’on ne recrute pas une personne issue d’un quartier prioritair­e ou en situation de handicap sont les mêmes : le rejet de l’autre et la présence de biais, de stéréotype­s. L’outil devrait être disponible avant l’été et sera utilisé sur la base du volontaria­t. Plutôt que de forcer les entreprise­s, nous voulons provoquer une réelle prise de conscience. Je crois plus à la bonne volonté qu’à la coercition. »

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