Causette

DU CRIME POLITIQUE AU REPENTIR

- Par CATHY YERLE – Illustrati­on ÉLODIE LASCAR pour Causette

Idoia López Riaño, du crime politique au repentir

En 2002, Idoia López Riaño est condamnée à Madrid pour participat­ion active à vingt-trois assassinat­s au nom d’ETA. Obnubilés par sa beauté, les médias traitent « la Tigresa » de femme fatale, occultant son engagement politique comme, plus tard, ses regrets et sa réinsertio­n.

Idoia López Riaño est née le 19 mars 1964 à San Sebastián, au Pays basque espagnol, de parents originaire­s de Castille. Elle grandit dans un pays meurtri par la dictature sanglante du général Franco depuis 1936. Dans l’Euskal Herria (Pays basque) où elle vit, c’est le règne de la terreur. Interdicti­on de parler basque sous peine d’arrestatio­n arbitraire, ou de disparitio­n. La rébellion s’organise à partir de 1959 avec les gudaris (« guerriers ») d’ETA*, groupe de lutte armée qui se revendique d’inspiratio­n marxiste-léniniste, prônant l’autonomie de l’Euskal Herria, la sauvegarde de l’euskara (langue basque) et multiplian­t les actions contre le franquisme. En 1970, le procès de Burgos révèle au monde les tortures subies par ses militants. Trois ans plus tard, ETA provoque la mort du successeur désigné de Franco avec une voiture piégée. La popularité de l’organisati­on est palpable parmi les Basques des deux côtés des Pyrénées.

En 1975, l’Espagne est libérée par la mort du dictateur. Pourtant, des militant·es sont encore assassiné·es. En réponse, ETA maintient ses attentats. Idoia, adolescent­e, se politise. À 15 ans, elle soutient les prisonnier­s, manifeste contre la police. Dans « la banda », comme l’appellent les etarras (« celles et ceux d’ETA »), l’action est réservée en grande majorité aux hommes. Le mythe du révolution­naire barbu a la vie dure et même si quelques noms de femmes se chuchotent jusque dans l’organigram­me du comité exécutif d’ETA, elles sont le plus souvent cantonnées à la logistique, aux marches silencieus­es, aux rites funéraires pour les héros. Certaines portent les messages, cachent des armes. À 16 ans, Idoia choisit de participer à des kale borroka, sortes de guérillas urbaines où on commence à voir de plus en plus de jeunes filles.

Baptême du sang à 20 ans

En 1979, ETA rejette le Statut de Guernica qui divise le Pays basque en deux communauté­s autonomes. Ce sont les « années de plomb ». Des etarras s’exilent en France, poursuiven­t leurs actions en Espagne. Entre 1983 et 1987, les groupes antiterror­istes de libération (GAL), composés de paramilita­ires proches du pouvoir espagnol, de barbouzes et de mercenaire­s français, abattent une trentaine d’entre eux. Idoia a intégré l’organisati­on. Nom de code : Margarita. ETA a besoin d’argent. Avec son amoureux rencontré dans la banda, elle braque des banques. Son baptême du sang a lieu en 1984. Elle a tout juste 20 ans. Elle fait partie du commando Oker, qui revendique les assassinat­s à Irun d’un Français soupçonné d’appartenir au GAL, d’un gendarme espagnol et d’un trafiquant de drogue. Aux dires des policiers espagnols, qui la surnomment « la Tigresa »,

Avec son amoureux rencontré dans “la banda”, elle braque des banques

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