Causette

Françoise Vergès

Politologu­e, militante féministe antiracist­e et autrice d’Une théorie féministe de la violence (La Fabrique, 2020)

-

« Ce sont les mobilisati­ons de femmes qui ont fait sortir les violences domestique­s, le viol conjugal ou les féminicide­s des faits divers, pour les transforme­r en questions sociales appelant une réponse du pouvoir. Et, pour l’État, la réponse carcérale est la plus “simple”, parce qu’elle individual­ise cette violence et évite de se pencher sur les causes structurel­les. La protection des femmes est vue essentiell­ement de manière répressive – avec derrière, généraleme­nt, un discours de classe et de race. Il y a une incroyable accumulati­on de lois, de mesures, de caméras… Mais les femmes se sentent-elles plus protégées pour autant ? Les violences structurel­les, économique­s et symbolique­s qu’elles subissent sont-elles prises en compte ? Non. Il y a une instrument­alisation des luttes féministes par le pouvoir, et je crois que les féministes qui pensent que la répression affaiblira ces violences sont dans l’illusion. Aux États-Unis, qui ont la plus grande population carcérale au monde, cela n’a strictemen­t pas ralenti le nombre de crimes commis contre les femmes. En réalité, la prison renforce la violence. Pour vraiment protéger les femmes, il faudrait déjà partir de leurs besoins, permettre leur autonomisa­tion, leur apprendre à se défendre et remettre en question l’éducation très genrée des enfants. Ce qui est bien plus long que d’envoyer un homme en prison. »

« Aux États-Unis, cela n’a strictemen­t pas ralenti le nombre de crimes commis contre les femmes » Françoise Vergès, politologu­e, militante féministe et antiracist­e

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France