Causette

MONTSERRAT

29 ans

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« L’ouvrage de Leslie Feinberg, Stone Butch Blues, m’a beaucoup marquée. Parce que c’est la voix et la mémoire d’une partie importante de notre histoire, à nous, LGBTQI. Je l’ai recommandé comme une évidence à Alix. Quand iel a commencé à partager avec moi ses pensées, ses envies d’exprimer son identité, j’ai été à fond. Pour moi, sa démarche est naturelle. Je n’ai aucun problème avec ça, je m’adapte à tout.

En revanche, j’avais quelques peurs pour iel. Principale­ment qu’iel rencontre dans son parcours des soignant·es transphobe­s, qui lui auraient fait du mal. Alix voulait prendre de la testostéro­ne sous contrôle, avec psychologu­e et endocrinol­ogue. J’ai agité mon réseau dans la communauté afin de savoir quelles étaient les personnes safe pour l’accompagne­r dans ce parcours. Et il y a les bonnes surprises de la vie : la pharmacien­ne à côté de chez nous est par exemple super gentille.

La décision d’Alix, cette nouvelle étape de sa vie, ne change rien de mon côté. Évidemment qu’iel m’attire toujours autant. Et je me définis toujours comme lesbienne. Ou plus précisémen­t comme une grosse gouine. Il y a une essence politique dans la façon dont je définis mon identité : ce n’est pas le sexe ou le genre de mon ou ma partenaire qui fait ce que je suis. J’étais lesbienne avant d’être amoureuse d’une femme.

Dans la rue, les gens ne savent pas vraiment comment nous situer et ça nous fait marrer. Parfois, on nous prend pour un couple de garçons. Parfois de filles. Parfois pour des hétéros. Ce qui me plaît, je l’avoue, c’est quand quelqu’un nous genre d’une certaine façon, puis se reprend et s’emmêle les pinceaux en se justifiant. Je me dis que, pour une fois, ce sont les autres, les hétéros, qui sont dans l’embarras. Et c’est assez jouissif.

Et de mon côté, je ne genre pas toujours Alix de la même façon. J’utilise vraiment les trois genres : féminin, masculin et neutre… Il faut dire que nous parlons beaucoup en espagnol entre nous – iel a appris ma langue maternelle – et que c’est un peu plus simple qu’en français. Au lieu de choisir entre le “o” ou le “a” final, nous utilisons le “e”. C’est devenu pour nous tout à fait naturel. » ●

« POUR MOI, SA DÉMARCHE EST NATURELLE. JE N’AI AUCUN PROBLÈME AVEC ÇA, JE M’ADAPTE À TOUT »

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