L’AMOUR PLUS FORT QUE LA HAINE
Le coup de foudre improbable, dans l’enfer de la « jungle de Calais », entre Béatrice, veuve d’un policier sympathisant FN, et Mokhtar, enseignant iranien arrivé clandestinement en Europe… Le sujet était potentiellement casse-gueule. Mais Ils sont vivants, le premier film de Jérémie Elkaïm − bien qu’il ait coscénarisé pas mal de ceux de Valérie Donzelli −, happe rapidement. Inspirée d’une histoire vraie, celle de Béatrice Huret qu’elle a racontée dans un livre, Calais mon amour, cette vibrante fiction, qui adopte une forme ardente pour conter un élan impérieux, relate un double parcours de libération. Un peu celui de Mokhtar et beaucoup celui de Béatrice, au départ prisonnière de ses préjugés et de son milieu, sinon des lois françaises.
Le filmage immersif d’Elkaïm saisit au mieux la surprise de Béatrice face à la brutalité de la « jungle » (alors qu’elle vit juste à côté), tout comme le jaillissement inopiné de son désir pour Mokhtar, dont la beauté et le parcours la bouleversent. De fait, ce côté rugueux, urgent, sans fard, empêche le récit de sombrer dans la romance neuneu. Par ailleurs, l’intensité des scènes de sexe, singulièrement la première où Béatrice redécouvre le plaisir physique, est d’une rare justesse. Bien sûr, l’interprétation de Marina Foïs, superbe d’abandon, participe pour beaucoup de la puissance politique de l’ensemble. Reste qu’un film qui soutient que l’amour est plus fort que la haine ne peut être que salutaire. Singulièrement aujourd’hui. ●
Ils sont vivants, de Jérémie Elkaïm. En salles.