La guerre du goût est déclarée
L’humain passe un temps considérable à table. C’est même l’une de ses principales activités, avec le sommeil, loin devant la lecture de livres ou la fabrication de trophées de chasse. Dans les grandes villes, on a tendance à badiner avec la nourriture. On bâtit des « bars à céréales », des « bars à tacos », on s’agglutine derrière des « food-trucks » servant une « world cuisine » sans gluten, on se nourrit comme des cosmonautes soviétiques. Dans la France profonde, c’est une autre histoire. Il en va encore de la survie. À l’occasion de l’octobière, festival dédié aux bières artisanales, la première bière au cassoulet a été présentée. Le breuvage a été réalisé avec les ingrédients traditionnels de ce plat enraciné. Son promoteur en décrit le goût à nos confrères de La Dépêche du Midi : « Au nez on a bien l’arôme du cassoulet et, en bouche, le côté soyeux du haricot, de même que le goût de la viande. » L’ambassadeur de la Grande Confrérie du cassoulet est dubitatif. La crise couve à Castelnaudary. À Rians, en Provence, on a célébré religieusement la courge. L’espace d’un week-end, en octobre, la courge était partout, dans les rues et dans les têtes. On a élu solennellement la courge la plus lourde et la plus insolite ; et on a présenté mille objets usuels fabriqués à partir de courges. D’autre part, à l’occasion de la « Journée de l’oeuf » le monde entier a découvert la croisade de l’association de sauvegarde de l’oeuf mayo (ASOM). Comme l’avait bien anticipé Benoît Duteurtre dans Le Retour du Général, l’oeuf mayo serait en danger. On ne le mangerait guère plus en dehors des cantines scolaires et réfectoires d’entreprises. « L’oeuf c’est bon, et la mayo c’est la vie », justifie l’un des aficionados de ce plat. Le temps passe, les oeufs durent. Enfin, Le Progrès nous signale que des melons se sont mis à pousser sur une tombe au cimetière de Bron. Le mystère n’est pas éclairci ; on ne sait pas si c’est le défunt lui-même qui aurait la main verte. La bouffe, c’est à la vie à la mort… •