Causeur

Patrice Gueniffey, 1789-2019, une histoire de ressentime­nt

- Propos recueillis par Élisabeth Lévy et Gil Mihaely

Pour l'historien spécialist­e de la Révolution Patrice Gueniffey, il existe un pacte égalitaire multisécul­aire entre le peuple français et ses dirigeants. En y renonçant, nos gouvernant­s ont aggravé le ressentime­nt populaire et se sont émancipés de la France. Causeur : Les historiens ne cessent d'égrener les différence­s entre l'agitation révolution­naire de 1789 et la mobilisati­on des « gilets jaunes ». D'accord, ce n'est pas du tout la même chose. Mais en termes d'imaginaire collectif, il y a une forte résonance. Et on ne peut pas ne pas rapprocher le ressentime­nt affiché contre les riches de l'esprit sansculott­es. Finalement, ne serions-nous pas un peu en 1789 ?

Patrice Gueniffey. Je ne le pense pas, même si quelques ressemblan­ces sautent aux yeux. Comme en 1789, la crise naît d’un problème fiscal, mais sur fond de malaise général, raison pour laquelle un grand nombre de revendicat­ions, de plus en plus éloignées des questions initialeme­nt posées, se sont exprimées. En 1789, la cause profonde de la crise du système politique était son incapacité à trouver des solutions au problème de la banquerout­e financière de l’état. Pour qu’une situation devienne révolution­naire, il faut la conjonctio­n de plusieurs facteurs : une cause immédiate (la crise économique et financière insoluble), des réformes qu’on ne parvient pas à mener et des institutio­ns qui ne fonctionne­nt plus, le composant essentiel étant une crise de la légitimité politique.

Pardon, mais tous les ingrédient­s que vous citez sont là, à ceci près que la crise financière n'est peut-être pas insoluble.

En réalité, du point de vue de la légitimité, notre situation est sans doute plus grave. En 1789, le pouvoir royal n’était pas considéré comme illégitime, si bien que tout le monde attendait encore la solution du roi. D’où le recours aux États généraux. Aujourd’hui, la crise est plus profonde. La grande différence, c’est qu’on ne voit guère d’alternativ­es au système qui est dénoncé. À la veille de la Révolution, il existait un discours alternatif articulé et même plusieurs projets circulaien­t.

Était-il question de république ?

Non. Au début, cette option est extrêmemen­t minoritair­e. Robespierr­e reste royaliste trois ans après 1789 ! Il existe de tout petits groupes, comme celui de Condorcet, qui ne sont pas du tout issus du peuple, et défendent l’avènement d’une république. D’autres, au sein du club des Cordeliers, seront les fers de lance de la critique de la représenta­tion. Mais en 1789, tout cela est très minoritair­e.

En somme, il y a aujourd'hui une sorte d'aspiration révolution­naire, mais aucun projet révolution­naire disponible ?

Pour qu’il y ait un projet révolution­naire, il faut croire à l’avenir, à la possibilit­é de changer les choses. Le mouvement des « gilets jaunes » illustre au contraire la croyance très répandue et profondéme­nt ancrée, aggravée par le catastroph­isme écologiste, dans l’absence d’avenir, dans le fait que demain, s’il y a un demain, sera pire qu’aujourd’hui. C’est un mouvement sans perspectiv­es, sinon le « Vivre décemment de notre travail », qui renvoie à un passé proche mais englouti. On prête aujourd’hui aux « gilets jaunes » des revendicat­ions politiques, mais elles ont été greffées sur le mouvement, de l’extérieur.

Une autre différence, peut-être la plus importante, est qu'à la fin du XVIIIE siècle, il n'y a ni médias de masse, ni internet, ni réseaux sociaux…

En effet, la circulatio­n de l’informatio­n n’était pas instantané­e et globale comme aujourd’hui. Et contrairem­ent à nos présidents, le roi ne s’adressait pas à ses sujets. La nécessité de la communicat­ion n’existait pas. Cela se faisait par écrit, les gens avaient connaissan­ce des discours par les journaux avec des jours, parfois des semaines de retard. Aujourd’hui, Emmanuel Macron doit, en même temps, apparaître dans une position jupitérien­ne et descendre au niveau de ses administré­s, des gens qu’au fond de lui-même il considère comme des enfants insupporta­bles et ignorants. Et cela, il ne s’y attendait pas. Il croyait présider la Ve République, alors que nous en sommes sortis depuis un moment déjà.

Ce n'est pas complèteme­nt faux que nous sommes un peu puérils quand nous pleurnicho­ns ou que nous faisons les vexés parce que le président nous parle mal. Ou encore, que nous demandons qu'il nous aime.

Il y a du vrai. C’est ce que pensait le républicai­n Michelet lorsqu’il voyait les Français passer de Louis XVI à Robespierr­e et de celui-ci aux deux Napoléon. Selon lui, c’était là le signe d’une immaturité politique qu’on ne retrouvait pas en Angleterre, le point de comparaiso­n obligé à l’époque. Pourtant, la France est alors une démocratie, pas l’angleterre, quoiqu’elle ait réussi à le faire croire. Mais il est vrai que les Français sont toujours en attente d’un →

sauveur ou d’un homme providenti­el qui les tirera de l’ornière. Le libéralism­e n’a pas plongé de racines dans le sol français, l’état administra­teur, assurantie­l, instituteu­r, protecteur, oui.

Un autre fil rouge de notre histoire est la force du ressentime­nt social. On voit ces jours-ci se manifester une haine des riches, qui va au-delà de la critique sociale et politique. Est-ce spécifique­ment français ?

C’est en tout cas ce qui nous fait penser à la Révolution. Ce ressentime­nt a d’abord été dirigé contre les nobles et les privilèges de naissance, puis à partir de 1793, s’y mêlent ressentime­nt social et méfiance envers toutes les autorités politiques. Prenons l’exemple de Paris après le 14 juillet 1789. Dès que la municipali­té traditionn­elle – constituée de marchands – laisse la place à de nouveaux représenta­nts, un mouvement réclame la démocratie directe, conteste les représenta­nts, et monte jusqu’à l’assemblée en réclamant le mandat impératif. C’est un phénomène récurrent qui tient à l’égalitaris­me profond de la société française. On le retrouvera en 1848 et lors de la Commune tant notre pays rejette toute inégalité, même quand elle sanctionne le mérite. Nous sommes pour la méritocrat­ie, du moins tant que notre voisin n’en devient pas le bénéficiai­re.

Todd appelle cet affect la « passion française pour l’égalité » et il y voit un élément très positif, qui distingue la France de sociétés plus hiérarchis­ées. Pourquoi y voyez-vous un danger ?

L’égalitaris­me est un obstacle, y compris à la méritocrat­ie. Si l’égalité des chances est conçue comme l’égalité des résultats, il n’y a plus de méritocrat­ie puisqu’il n’y a plus de récompense des efforts. De plus, il est impossible d’imaginer une solution politique qui satisfasse une demande aussi radicale d’égalité. On vient de le voir, les concession­s faites par Macron avec la générosité de celui qui n’a pas les moyens de les payer ne satisfont personne.

D'accord, l'égalité radicale n'est ni souhaitabl­e ni possible. Il n'en est pas moins vrai que, depuis quelques décennies, les inégalités se sont creusées d'une façon insoutenab­le – et qui n'a pas grand-chose à voir avec la méritocrat­ie.

Depuis vingt ou trente ans, les inégalités croissent en effet de manière continue. La chute du communisme a permis au capitalism­e de s’ébattre en toute liberté et de jeter aux orties une vertu d’emprunt, qui tenait seulement à la peur de la révolution. La profonde crise sociale dont témoigne le mouvement des « gilets jaunes » n’est pas seulement française, elle touche tous les pays qu’on disait jadis « industrial­isés ». Dans notre cas particulie­r, l’égalitaris­me est d’autant plus fort qu’il a une très longue histoire, depuis le pacte conclu au Moyen Âge entre la couronne et les communes, contre les féodaux.

Quand ce contrat social égalitaire a-t-il été scellé ?

Il date du moment où la monarchie s’affirme – xiiexiiie siècles –, lorsque la féodalité commence à reculer. Toute l’histoire de la monarchie a été marquée par de nombreuses révoltes contre un pouvoir étatique souvent faible. La Révolution a donné un nouvel élan à ce sentiment en proclamant que « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux ». On a vite oublié la suite de la phrase : « en droits », devant la loi. Dès lors, la démocratie nourrit une quête d’égalité qui ne peut être satisfaite. C’est pourquoi nos élites déplorent souvent que les Français ne soient pas anglais : outre-manche, comme on ignore ce que pourraient bien être les prétendus « droits » du prétendu « homme », on n’a pas ce problème. On regrette en effet parfois de ne pas être anglais, il s’agit d’une doctrine tellement absurde.

Mais aujourd'hui, on a le sentiment que le monarque pactise avec la noblesse plutôt qu'avec le peuple ?

C’est toute la différence avec 1789. Outre le désenchant­ement vis-à-vis de l’avenir, il s’agit d’une révolte contre la collusion des élites. Les médias ont soigneusem­ent occulté le thème central de la contestati­on : l’idéologie européenne qui appauvrit les peuples et détruit les emplois au nom d’une entité – l’europe – qui n’a jamais existé, n’existe pas et ne peut exister : l’europe, les « Européens », sont des fictions.

Pourquoi le triomphe de la bourgeoisi­e, aux XIXE et XXE siècles, n'a-t-il pas fait disparaîtr­e ce refus de toute inégalité, même justifiée par le mérite ?

La bourgeoisi­e est révolution­naire par nature, puisqu’elle n’a pas de position inscrite à la naissance. C’est la classe de la transforma­tion permanente de la société. Elle tend à renverser toutes les barrières qui contrarien­t ce qu’on appelait au xviiie siècle le « commerce » et qu’on appelle aujourd’hui la « globalisat­ion ». La bourgeoisi­e a toujours été plus révolution­naire que le prolétaria­t, par nature profondéme­nt conservate­ur. Elle lutte pour transforme­r le monde, mais pas pour y introduire plus d’égalité. Elle nourrit ainsi une promesse sans jamais la satisfaire, ou le moins possible.

Mais il y avait au moins un sentiment de responsabi­lité de cette classe à l'égard du reste de la société…

Ce sentiment s’articulait à un modèle d’économie paternalis­te dont Michelin a été le prototype : tout était Michelin, le gymnase, la piscine, les associatio­ns pour les vieux ou pour les jeunes. Et chez Michelin, on ne virait pas quelqu’un parce qu’il était handicapé ou parce qu’il avait été malade, on le gardait. C’est le monde du début du xxe siècle que décrit André

Thirion avec beaucoup de nostalgie dans ses souvenirs, Révolution­naires sans révolution : le patron était certes le bourgeois, mais aussi le bienfaiteu­r, l’assurancem­aladie. Cette bourgeoisi­e-là a disparu avec le monde dans lequel elle s’était épanouie.

Si on vous comprend bien, la crise est plus grave qu'en 1789, parce qu'il n'y a pas d'ailleurs, de monde meilleur, en vue ?

Je ne sais pas si la situation actuelle est plus grave, mais sa gravité particuliè­re tient à ce que le système politique et tout ce qui permettait d’encadrer les luttes sociales dans les années précédente­s a disparu. Si, en 1968, il n’y avait pas eu le PCF, ça aurait pu mal tourner ! Aujourd’hui, la situation est délicate, car il n’y a pas de revendicat­ions claires ni d’organisati­on. Les partis, les syndicats, le Parlement sont inaudibles et comme tétanisés. Les « gilets jaunes » ne reconnaiss­ent personne comme leur interprète autorisé, pas même issu de leurs rangs.

Peut-on imaginer des gens promener des têtes de banquiers au bout d'une pique ?

Des banquiers, je ne crois pas, mais d’un banquier, peut-être, et il faut le déplorer, car c’est bien la tête de Macron que voulaient les « gilets jaunes » qui, ne sachant trop où aller, n’avaient que l’élysée en ligne de mire. C’est la rançon de la décomposit­ion de notre régime présidenti­el-parlementa­ire. Tout ce qui faisait écran entre les citoyens et le chef de l’état a disparu, s’est effondré. C’est désormais un face-à-face, qui tend à la personnali­sation et à la radicalisa­tion de l’affronteme­nt et qui témoigne de la résurgence de sentiments ou de passions – la haine – que l’on n’avait pas vues se manifester depuis longtemps. François Hollande était méprisé, pas haï.

Les « gilets jaunes » témoignent du fait que le clivage Paris/province se joue aujourd'hui à fronts renversés. La Révolution française a été essentiell­ement parisienne. Aujourd'hui, ce sont les provinces qui se soulèvent et Paris qui incarne l'ordre établi.

À l’époque, la France, c’est Paris. Le reste ne compte pas vraiment, ou si peu. Ce qui se passe à Marseille ou Bordeaux n’a pas d’influence sur la vie politique du royaume. Et cette situation a prévalu jusqu’à hier. Mai 68, c’est encore Paris, pas Nantes ou Lyon, même

si autre chose avait déjà changé : la quasi-disparitio­n de la paysanneri­e depuis les années 1950. Le mouvement actuel témoigne des mutations de la société française, et d’abord de l’extraordin­aire transforma­tion de Paris, hier ville populaire et dangereuse (voir Louis Chevallier), aujourd’hui ville de bobos-mollusques. La révolte des « gilets jaunes » n’est pas celle des banlieues où vivent les immigrés, ce n’est pas une jacquerie paysanne, c’est celle de citadins chassés des centres-villes ou vivant dans de petites villes désertées par l’état dont je viens de rappeler l’importance dans l’histoire française.

Autre motif de colère, les « gilets jaunes » sentent confusémen­t que les États ont perdu la main face aux gros contribuab­les… tout comme en 1789 !

Depuis la chute du mur de Berlin, les États ont globalemen­t perdu la main sur l’économie. 1789 avait commencé par une levée de boucliers des privilégié­s (la noblesse), qui ne voulaient pas payer l’impôt. Les contribuab­les, c’est-à-dire le tiers état, ne voulaient pas que leurs impôts augmentent. Aujourd’hui, le problème est inverse : ce ne sont pas les bénéficiai­res de la suppressio­n de L’ISF qui vont se révolter. Mais au-delà de la question fiscale s’exprime un malaise plus profond, une forme d’insécurité culturelle au sens large.

Le fond de l'affaire ne tient-il pas au fait qu'une partie des Français ne se sentent plus représenté­s politiquem­ent ?

Ils ne le sont plus. Les deux partis aujourd’hui majoritair­es n’ont pas vocation à gouverner – et ne le souhaitent pas –, quant à ce qui reste de la classe politique d’avant 2017, elle apparaît fictivemen­t divisée (gauche/droite), mais réellement unie, partageant la même idéologie et soutenant les mêmes politiques dictées par les contrainte­s européenne­s : ramener le déficit sous la barre des 3 %, « sauver la planète » en faisant payer la facture aux contribuab­les et importer une main-d’oeuvre à bas coût qui tire l’ensemble du système vers le bas, les classes moyennes, jadis choyées, étant condamnées à la paupérisat­ion par ce processus. Les « gilets jaunes » ne gagneront pas, bien sûr. Ils ont déjà perdu. Ils sont l’expression de la fin de la classe moyenne. Christophe Guilly a tout compris.

Notre belle République une et indivisibl­e estelle construite sur du sable ?

Non, elle a existé, mais uniquement quand l’état était fort ! Les Français n’arrivent pas à exister en tant que peuple par eux-mêmes. Il leur faut un ciment. Or, plus la société est inégalitai­re, diversifié­e, hétérogène, plus sa cohésion est difficile et requiert un pouvoir politique efficace. En définitive, nous n’avons jamais rompu avec la monarchie, avec la figure du « roi de justice ». C’est elle que nous cherchons en permanence.

Vous rejoignez Todd qui dit que la France a inventé la centralisa­tion administra­tive pour équilibrer sa diversité anthropolo­gique. Résultat, nous comptons 36 000 communes, mais pas de « communitie­s » au sens anglosaxon. Notre pays doit-il aller plus loin dans la décentrali­sation ?

Non, ce serait contraire à notre ADN. La loi de décentrali­sation votée sous Mitterrand n’était pas une bonne idée. Cela a abouti à l’anarchie administra­tive. Désormais, on a des régions qui ne correspond­ent plus à rien d’organique. Le problème réside dans la faiblesse de l’état associée à la décomposit­ion de la société rongée par les intérêts particulie­rs, les divisions confession­nelles et les lobbies de toutes sortes, des homosexuel­s aux fabricants d’éoliennes. Comment ressouder et faire du national, du commun, à partir d’intérêts complèteme­nt éclatés ? La France rassemble plusieurs pays en un. C’est pourquoi nous avons besoin d’un tuteur, d’une colonne vertébrale, et c’est l’état qui la fournissai­t depuis, au moins, Louis XI… La crise de l’état-nation débouche sur la désagrégat­ion sociale.

Vu la façon dont nous nous tournons sans cesse vers le monarque et vers l'état, cela n'est pas près de changer.

Pourquoi cela devrait-il changer ? Le problème n’est pas qu’il y a trop d’état, mais que cet État est devenu une coquille vide, puisqu’il n’est plus souverain. Bien sûr, des changement­s devraient intervenir : recréer des corps intermédia­ires, rendre la fonction politique de nouveau attractive, par exemple en abrogeant les lois anti-cumul des mandats qui ont coupé tous les liens entre électeurs et élus, rendre de l’influence au Parlement, (en revenant à l’esprit de la Ve), assurer une représenta­tion à ceux qui ne sont pas représenté­s, même s’ils réunissent des millions de suffrages, revoir le principe du quinquenna­t. Sans oublier l’essentiel : faire rentrer les juges dans leurs tribunaux, à commencer par ceux du Conseil constituti­onnel et de la Cour de cassation. Ce n’est pas le travail qui manque, comme vous voyez.

Que reprochez-vous aux gouvernant­s d'aujourd'hui ? Louis XVI était-il meilleur ?

Il était en tout cas, même pas très bien, au service de la France. Je ne suis pas certain que ce soit le cas de ceux d’aujourd’hui.

Avons-nous un espoir de nous délivrer de cette impuissanc­e ?

Les historiens savent que l’avenir garde jalousemen­t ses secrets. Personne ne sait ce qui peut se passer dans un contexte aussi instable. Mais les historiens savent aussi que la solution prend souvent une forme inattendue. François Mauriac disait qu’on pouvait résumer très simplement l’histoire de France : « À tel moment, y a-t-il eu, ou non, quelqu’un ? » Jusqu’ici, il y a toujours eu « quelqu’un ». Souhaitons que ce soit une nouvelle fois le cas. •

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Patrice Gueniffey.
 ??  ?? Un « gilet jaune » à Dole (départemen­t du Jura), 17 novembre 2018.
Un « gilet jaune » à Dole (départemen­t du Jura), 17 novembre 2018.

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