Causeur

Fabienne Pascaud, plus ridicule que précieuse

Sur France Inter, l'émission « Le masque et la plume » est un bonheur d'intelligen­ce critique. L'affligeant­e chroniqueu­se de Télérama et spécialist­e du poncif Fabienne Pascaud fait figure d'exception.

- Cyril Bennasar

Si je lis peu mon contempora­in, si je vais peu au cinéma et encore moins au théâtre voir ce que produit l’époque, je le dois sans doute au flair que j’ai développé pour la médiocrité ambiante et à une certaine intuition pour l’imposture moderne, mais pas seulement. Je n’échapperai­s pas à la plupart des indigestes navets que le monde culturel nous sert aujourd’hui sans répit, sans l’aide précieuse ni les conseils avisés des profession­nels de la critique qui s’attablent chaque dimanche soir autour de Jérôme Garcin pour donner à entendre sur France Inter le meilleur des spectacles joués à Paris et en province dans l’émission « Le masque et la plume ». Il suffit d’attendre qu’un film ou qu’une pièce soit diffusé à la télé pour réaliser qu’à la radio, le débat est plus riche que le sujet débattu et le commentair­e plus distrayant que l’oeuvre commentée. La distributi­on est toujours inégale et le talent mal réparti, mais entre les auteurs et les comédiens de cette troupe, l’échange des points de vue est souvent un régal. Les uns nous consternen­t, les autres nous ravissent, et si nous sommes sous le charme, c’est qu’il y a plus de talent, d’esprit et d’humour chez un Nerson ou chez un Neuhoff que dans un film de Philippe Godeau, une pièce de Sébastien Thiéry ou dans un livre d’édouard Louis.

Mais attention, il est préférable de se demander qui parle avant de prendre au pied de la lettre un avis et de suivre une recommanda­tion. Il faut savoir parfois rectifier le tir et corriger la sentence pour avoir une idée juste de ce qu’on peut éventuelle­ment lire ou de ce qu’on ne doit surtout pas aller voir. Dans certains cas, on peut être sûr de ne pas se tromper en prenant conseil et en ne le suivant pas. Les soirs de théâtre, parmi les boussoles qui indiquent le sud à coup sûr, il en est une particuliè­rement fiable : Fabienne Pascaud.

Sur un ton tantôt pédant tantôt snob, la dramatique critique et directrice de la rédaction de Télérama enfile semaine après semaine les perles les plus mal dégrossies que la paresse intellectu­elle et le conformism­e bien-pensant puissent produire. On ne l’attend plus au tournant, on la voit venir de loin et tomber en ligne droite dans tous les panneaux que le progressis­me imbécile a dressés sur les sentiers battus et rebattus de ses démonstrat­ions. Même si sa voix était travestie,

nous saurions que la gourde qui juge Molière misogyne parce qu’il a écrit des personnage­s de femmes ridicules, c’est Fabienne Pascaud.

On en vient à se demander si c’est pour qu’aucune ânerie politiquem­ent correcte ne se perde et qu’aucun poncif ne nous soit épargné, comme quand elle dit sans rire que l’idée de faire jouer le personnage d’un homme par une comédienne est en soi une idée intelligen­te, ou qu’elle juge scandaleux qu’un personnage de fiction puisse être à la fois escroc et socialiste, que l’animateur invite une experte dans le maniement du poncif et de l’ânerie : Fabienne Pascaud.

Si l’on ne veut pas perdre son temps à la représenta­tion de l’un de ces montages grossiers par lesquels des metteurs en scène en manque de modestie et en quête de subversion prennent en otage les chefs-d’oeuvre de notre répertoire classique pour les mettre au service de l’idéologie de l’époque ; si l’on craint de perdre son humour et son sang froid au spectacle de Phèdre ou de Bérénice, embarquées avec le spectateur dans de véritables galères et condamnées à ramer dans le sens de l’histoire, réquisitio­nnées pour dénoncer le colonialis­me, le racisme, le sexisme ou l’homophobie ; si l’on redoute de souffrir en voyant Cyrano neurasthén­ique et sans panache ou dom Juan dépressif et pénitent pour avoir trompé des femmes, les deux s’escrimant pour nous servir des leçons de pacifisme, de tolérance ou de féminisme, il faut prendre soin de dégauchir avant de s’en servir les recommanda­tions attendues de Fabienne Pascaud.

Même quand elle doute et qu’elle s’interroge, la tenancière renommée d’une rubrique dramaturgi­que peut atteindre des sommets dans l’art de pérorer au ras des pâquerette­s. Même lorsqu’elle aborde des sujets sérieux, la gardienne du dernier bastion du gauchisme culturel reste comique. Ainsi, en prenant ce raccourci du langage qui trahit un raccourci de la pensée et nous écorche les oreilles, il lui arrive de s’interroger « sur comment » une partie du peuple de gauche, malgré les efforts acharnés de sa corporatio­n, a pu rejoindre le Front national, sans voir, cet épouvantai­l à populo, qu’elle en est une des nombreuses raisons, sans comprendre qu’une partie de la réponse tient en deux mots : Fabienne Pascaud. •

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Fabienne Pascaud, en 1985.

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