LE CO2, UNE CHANCE POUR LA PLANÈTE ? Par François Gervais
Vilipendé à tort, le CO2 est un bienfait pour l'humanité qui a permis de revégétaliser une bonne partie de la planète. Au nom de prévisions alarmistes, la France fait peser sur ses citoyens les plus modestes le coût d'une transition énergétique aux effets incertains.
Àentendre certains, nous sommes coupables de rien moins que de « crime contre l’humanité ». Conjurer l’armageddon impose de faire pénitence. Dans la lutte contre le mal absolu, le maître mot est « décarboner ». Confessons-le, la combustion des ressources fossiles, charbon, pétrole, gaz naturel, gaz de schiste, a contribué en un siècle à augmenter la proportion de gaz carbonique (CO2) dans l’air de 0,03 % à 0,04 % en volume. Ce passage de trois à quatre molécules de CO2 pour 10 000 molécules d’air justifie-t-il l’urgence d’une transition énergétique, comme le tambourinent les promoteurs des actions en justice contre l’état français et autres marches « pour le climat » ? Et même si on refait le calcul en ajoutant la vapeur d’eau, notamment des nuages – principal gaz dit « à effet de serre » –, l’augmentation est infime. Est-ce trop ? Ou trop peu ? Résurgence des Rogations, ces journées précédant le jeudi de l’ascension où on priait pour la protection des cultures ?
En revanche, la faiblesse de cet accroissement n’empêche nullement le CO2 de rester la nourriture la plus recherchée par la végétation. Ainsi, en trente-trois ans, cet accroissement du taux de dioxyde de carbone (CO2) dans l’air a enrichi la planète d’une masse de végétation qui est l’équivalent d’un sixième continent vert que l’on peut observer par satellite et dont la superficie atteint 18 millions de km2, soit 33 fois la superficie de la France métropolitaine1. Cette végétation – la principale composante de la biomasse de notre planète – absorbe chaque année – et depuis trente-trois ans – 2,6 gigatonnes de carbone, qui représentent 0,6 % du volume total de carbone végétal. En termes de contribution à la croissance des récoltes et des plantes nutritives, le bénéfice pour l’humanité a été estimé à 3 000 milliards d’euros de 1961 à 20112. Au contraire d’être le « polluant » vilipendé à tort, le CO2 est donc un fertilisant gratuit, un bienfait, en particulier pour le milliard de nos contemporains souffrant de la faim.
En regard de ces bénéfices, l’effet de serre du CO2 induirait-il une augmentation de température insupportable, comparée aux variations diurnes ou saisonnières ? Commençons par rappeler que les périodes froides de l’histoire, comme le petit âge glaciaire à la fin du règne de Louis XIV, ont provoqué mauvaises récoltes et épidémies, alors que les périodes plus chaudes comme l’optimum romain ou médiéval furent plus prospères. Et maintenant, passons aux faits de ce réchauffement. Le dernier rapport AR5 du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) montre la perplexité des « experts », terme rajouté dans le titre français, mais absent du titre anglo-saxon IPCC (P pour panel). De combien de degrés s’échaufferait la planète si la proportion de CO2 doublait dans l’air – accroissement que, comme nous l’avons vu plus haut, l’on est très loin d’atteindre ? Le GIEC hésite entre 1,5 °C et 4,5 °C – même incertitude que dans le rapport Charney publié il y a quarante ans ! En envisageant quatre scénarios d’émissions, le GIEC prévoit une hausse de la →
température d’ici 2100 comprise entre 0,3 °C et 4,8 °C.
D’où proviennent des incertitudes aussi considérables ? Pour partie du rôle mal connu des nuages – donc de la vapeur d’eau dans l’atmosphère – qui, en réfléchissant l’énergie solaire, privent la Terre d’une partie de celle-ci. Ces incertitudes se traduisent par des divergences entre les différents modèles de climat étudiés par le GIEC, qui apparaissent dans la figure 1. Tous ces modèles donnent des projections supérieures aux observations de la période de 1998 à 2012, durant laquelle la courbe est à peu près plate. Cette « pause » se prolonge jusqu’à nos jours – comme le montre la figure 2 – si l’on fait abstraction de fluctuations liées au phénomène naturel El Niño de 2016.
Depuis 1945, début de l’accélération des émissions de CO2, la hausse de température constatée est de 0,4 °C. Mais elle a baissé de 1945 à 1975, ce qui ne plaide pas en faveur d’une corrélation avec le CO2. Elle s’est ensuite élevée, mais pas plus que de 1915 à 1945, alors que les émissions étaient six fois inférieures aux valeurs actuelles. Là encore, on a du mal à discerner une corrélation. En revanche, si l’on considère un cycle d’environ 60 ans qui se dessine dans l’évolution à la figure 2, la température pourrait à nouveau baisser dans les années à venir. Fig. 1 – Reproduction de la figure TS.14(A) du rapport AR5 du GIEC montrant (I) que les modèles de climat virtuel (en couleur) ne sont pas du tout d’accord entre eux, (II) qu’ils prévoient des températures plus élevées que les observations (en noir). La figure 2 montre que la « pause » observée de 1998 à 2012 se prolonge. Fig. 2 – Évolution de la température moyenne de la Terre selon plusieurs sources à peu près d’accord entre elles (HADCRUT4, UAH, RSS). Les émissions de CO2 ne se corrèlent évidemment pas à l’oscillation d’environ 60 ans observée. La flèche RCP8.5 pointe vers la température à la fin du siècle prévue par le scénario du GIEC sans limitation des émissions, confirmant l’écart grandissant entre mesures et modèles du GIEC.
C’est à la base de cette faible corrélation et avec ces incertitudes dans les projections que la Banque mondiale, grande spécialiste du climat comme chacun sait, a établi le devis colossal pour la « lutte » contre le réchauffement climatique – 89 000 milliards de dollars d’ici 20303. Quand les États cumulent déjà une dette souveraine de 60 000 milliards, faudrait-il la multiplier par 2,5 ? En France, où la dette atteint 2 200 milliards d’euros, les Français devraient donc débourser, soit sous forme de taxes, soit par l’endettement, quelque 3 300 milliards d’euros supplémentaires. Pourquoi ? Pour éviter un réchauffement de l’ordre de 0,2 °C d’ici cinquante ans selon un corpus issu plus de 3 000 publications dans des revues internationales à comité de lecture dont les conclusions n’ont rien de catastrophiste4.
Et même si les Français font cet effort colossal, quel impact aurait-il sur la planète quand la France est responsable de seulement 0,9 % des émissions mondiales de CO2 ? Dans l’hypothèse d’un réchauffement de 0,2 °C en 50 ans, la France serait donc responsable de seulement 0,002 °C. Éviter ces deux millièmes de degré justifie-t-il une dépense budgétaire et/ou un endettement hexagonal de 3 300 milliards d’euros ? Nos prélèvements obligatoires sont déjà les plus lourds d’europe. L’augmentation des taxes sur les carburants sur le prétexte climatique, en réalité pour renflouer les caisses de l’état, s’est révélée intenable pour ceux qui ont du mal à finir le mois.
Le climat change comme la météo a toujours changé. « Chaque saison est à coup sûr “extraordinaire”, presque chaque mois est un des plus secs ou un des plus humides, ou un des plus venteux, ou plus froid, ou plus chaud », pouvait-on lire dans le Brisbane Courrier le 10 janvier 1871… Cent cinquante ans après, les médias surfent encore sur ce thème vendeur. Pourtant, la hausse du niveau des océans, mesurée par 2 133 marégraphes, s’établit à une moyenne de 1,04 mm par an5, extrapolable à 8 cm d’ici la fin du siècle. Le volume de la banquise arctique reste stable, à l’exception de l’impact des fluctuations météorologiques, depuis une dizaine d’années6. Les politiques françaises abusivement qualifiées de « climatiques » se réduisent à une importation massive de panneaux solaires photovoltaïques, principalement en provenance de Chine, et d’éoliennes importées d’allemagne. Elles ne servent qu’à produire de l’électricité, alors que l’énergie électrique ne représente qu’un quart de l’énergie consommée. Or, selon les indications D’EDF sur la facture, en 2016, seulement 5,3 % de l’électricité a été produite par des combustibles fossiles (1,4 % par du charbon, 2,6 % par du gaz, 1,3 % par du fioul). Cette politique vise donc à décarboner une fraction d’énergie de 1,3 %... un pourcentage excessivement éloigné de l’ambition clamée. La Cour des comptes l’a dénoncée. Outre les coûts plus élevés des énergies renouvelables7 et les problèmes liés à leur intermittence, il faudrait encore démontrer que, sous nos latitudes, le retour énergétique sur investissement énergétique peut être supérieur à celui des énergies conventionnelles8. Du reste, les énergies intermittentes ont peu de chance de diminuer les émissions puisque, comme l’a montré l’exemple allemand à plus grande échelle, il a fallu pallier l’intermittence par la production d’électricité à partir de combustibles fossiles. De fait, on assiste à une croissance des émissions allemandes.
Quant aux augmentations des émissions en Chine et en Inde, elles sont 100 fois supérieures aux réductions françaises. Ces deux pays, arguant du nécessaire développement de leur économie, ont annoncé qu’ils continueraient à ce rythme jusqu’en 2030. Les politiques françaises, à l’impact déjà minuscule, apparaissent donc inutiles, coûteuses et injustes dans la mesure où, renchérissant le coût de l’électricité à l’instar de celui des carburants, elles frappent prioritairement ceux de nos concitoyens dont le poste « énergie » grève exagérément le pouvoir d’achat.
Il y a suffisamment d’excellentes raisons de préserver notre environnement pour ne pas gaspiller nos impôts dans des politiques dont certaines n’ont de durable que l’affichage. Économiser les ressources fossiles grâce au développement de l’efficacité énergétique procède du bon sens, sans le besoin du catastrophisme climatique. •
1. Z. Zhu et al., « Greening of the Earth and its Drivers », Nature Climate Change, 2016 (doi:10.1038/nclimate3004). 2. Craig D. Idso, « The Positive Externalities of Carbon Dioxide : Estimating the Monetary Benefits of Rising Atmospheric CO2 Concentrations on Global Food Production », Center for the Study of Carbon Dioxide and Global Change, 2013. 3. « Raising the Billions and Trillions for Climate Finance », Worldbank.org, 2015. 4. Lien vers 500 publications de 2018 : « Climate Alarm Unsettles in 2018 », Notrickszone.com, 3 janvier 2019. 5. A. Parker, C. D. Ollier, « Analysis of Sea Level Time Series », Physical Science International Journal, n° 6(2), 2015, pp. 119-130 (DOI: 10.9734/ PSIJ/2015/15652) 6. Ocean.dmi.dk/arctic/icethickness/thk.uk.php 7. Rémy Prud'homme, Le Mythe des énergies renouvelables, L'artilleur, 2017. 8. D. Weissbach et al, « Energy Intensities, EROIS (Energy Returned on Invested) and Energy Payback Times of Electricity Generating Power Plants », Energy, vol. 52, 2013, pp. 210-221. *. F. Gervais, « Anthropogenic CO2 Warming Challenged by 60-Year Cycle », Earth-science Reviews, 155, 2016, p. 129-135.