Causeur

Pure Malte

- Par Gabrielle Périer

Il n’y a pas qu’en France ou aux États-unis que les forces de l’ordre sont régulièrem­ent accusées de racisme. Depuis trois mois, à Malte, le meurtre du migrant ivoirien Lassana Cissé déchaîne les passions. Tué sur la route de l’usine dans laquelle il travaillai­t, ce pauvre hère aurait été abattu par deux soldats de l’armée maltaise « parce qu’il était noir ». C’est du moins ce que les prévenus auraient avoué aux enquêteurs d’après le Times of Malta. En attendant que la justice livre son verdict, les responsabl­es politiques se renvoient la responsabi­lité du meurtre, s’accusant mutuelleme­nt de ne pas avoir été assez accueillan­ts et inclusifs. Sur l’île membre de l’union européenne, l’afflux de migrants en provenance de la Tunisie ou de la Libye voisines est pourtant loin de faire l’unanimité. Ainsi, le président du Comité gardien des génération­s futures (quel beau nom d’institutio­n !) Maurice Mizzi a dû remettre sa démission au ministère de l’environnem­ent pour avoir dit en interview : « En ce moment, il y a tellement de musulmans qui arrivent – ils ont tous neuf enfants, alors que nous en avons deux – et ils finiront par prendre le dessus. » Malte, pays raciste ? C’est ce que martèlent plusieurs journaux locaux, pointant du doigt l’influence du troisième parti de l’île : Imperium Europa (IE). Loin derrière les deux grandes forces politiques maltaises qui totalisent 93 % des suffrages, ce groupuscul­e a atteint les 3 % aux européenne­s. Flanqué de son chef plus ou moins charismati­que, Norman Lowell, L’IE défend un projet fantasque mélange de New Age remixée à la sauce nazie. Au programme : la constructi­on d’un nouvel empire romain intergalac­tique par une élite païenne de « caucasoïde­s » pour en finir avec « la farce démocratiq­ue ». Pragmatiqu­e, Lowell a confié son antichrist­ianisme au site Vice mais admis que « beaucoup de gens le sont et nous ne pouvons pas les éliminer ». Sa clémence s’arrête cependant aux frontières d’une Europe blanche qu’il souhaite doter de « frontières tellement hermétique­s que même pas un lézard ne pourrait y entrer, et encore moins un nigérien ». Et comme deux précaution­s valent mieux qu’une, Lowell planifie d’envoyer des embryons dans l’espace pour sauver les gènes de la race blanche. On ne le chagrinera pas en lui rappelant que Malte n’a jusqu’ici donné son nom qu’à une race… d’oranges tunisienne­s. •

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