Causeur

Uber Matisse

- Par François-xavier Ajavon

L’époque, on le sait, cherche à tout désacralis­er : les figures d’autorité, l’héritage historique et même Notre-dame de Paris que l’on enlaidirai­t volontiers d’un « geste architectu­ral » contempora­in pour la faire basculer dans l’époque. Ainsi, l’art et les institutio­ns qui le portent deviennent des « lieux » où vivre des expérience­s récréative­s. Le théâtre du Châtelet, sous la responsabi­lité de la mairie de Paris, a ainsi transformé son salon Nijinski, au sommet de l’édifice, en boîte de nuit. Mais la soirée hip-hop a viré au fiasco (voir la « Chronique de l’ouvreuse »). La presse s’interroge gravement : l’avenir du clubbing est-il compromis au théâtre ?

Autres errements cultureux, l’oeuvre « flashy » temporaire commandée à l’artiste suisse Felice Varini pour rendre plus sexy les murailles de la Cité médiévale de Carcassonn­e, inscrite au patrimoine mondial de l’unesco. Ce collage monumental de cercles concentriq­ues a également tourné au fiasco. Un an plus tard, l’oeuvre n’apparaît plus si éphémère que ça. Après démontage, on découvre que les pierres ont été abîmées. Mais qu’importe, il fallait bien donner du tonus à cette cité bimillénai­re…

Quant aux musées, engagés dans une course à l’audience, ils se métamorpho­sent en parcs d’attraction­s. Le Louvre a invité Jay-z et Beyoncé à créer leur propre parcours d’oeuvres. Le centre Pompidou propose un atelier « Art détox », permettant au public de « humer » des parfums. On peut aussi faire du « yoga en famille » ou participer à un mystérieux « atelier bébé ». L’invasion de nouveau-nés gagne même le musée Matisse qui propose un atelier allaitemen­t. Mieux, à l’occasion de son agrandisse­ment, le musée consacré au peintre proposera une activité couture et un espace de coworking « ouvert à tous ». Ubérisons Matisse ! •

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France