Causeur

Pas de hasard Balthazar

- Par Frédéric de Natal

On a tendance à l’oublier, mais l’épiphanie n’est pas seulement un prétexte pour se goinfrer de frangipane, tirer les rois et choisir sa reine. Selon l’évangile de saint Matthieu, les trois mages venus d’orient, Melchior, Gaspard et Balthazar, auraient rendu hommage à Jésus lors de sa naissance. Dans les principale­s villes d’espagne, chaque 5 janvier, il est de coutume de représente­r cette scène dans une crèche vivante. Or, cette année à Barcelone, un homme à la peau bien claire s’est noirci le visage pour jouer le rôle de Balthazar, le plus africain des mages. Stupéfacti­on de l’autre côté de la Bidassoa : SOS Racisme crie au « blackface » ! Circonstan­ce aggravante, l’acteur d’un jour n’est autre que l’ancien maire de Madrid et ex-ministre de la Justice, le conservate­ur Alberto Ruiz-gallardon. Localement, ce grimage a aussi suscité des remous, notamment du côté de l’associatio­n intercultu­relle catalane Casa Nostra Casa Vostra. Le porte-parole de L’ONG a en effet déclaré que la présence d’un faux mage noir heurtait la sensibilit­é des « enfants noirs qui refusent de venir au défilé, blessés de voir des caricature­s d’eux-mêmes ». Indignée, l’associatio­n a lancé une campagne sur les réseaux sociaux baptisée « Pour un vrai Balthazar », réclamant « que l’année prochaine, le roi noir ne soit pas un personnage avec la peau peinte ». Si les stéréotype­s racialiste­s ont la vie dure, on n’a pas entendu ces belles âmes dénoncer le choix d’un acteur noir pour jouer Jean Valjean à Broadway. Ni l’installati­on de petits Jésus africains dans plusieurs crèches en Italie afin de symboliser la souffrance des migrants échoués en Méditerran­ée. Comme les flux migratoire­s, l’appropriat­ion culturelle est à sens unique. •

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