Causeur

L'étude scientifiq­ue qui démontrait l'inutilité de fermer les frontières

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Le 29 avril, Les Échos présente une étude scientifiq­ue sous un titre troublant : « Coronaviru­s : en France, l'épidémie ne serait pas venue directemen­t de Chine ou d'italie ». Une équipe de l'institut Pasteur emmenée par Étienne Simon-lorière a mis en évidence que « le Covid circulant en France n’est pas de même nature (clade) que le Covid italien ou chinois ». Il circulait à bas bruit depuis janvier. « Fermer les frontières n’aurait donc servi à rien », conclut Les Échos. Et le très sérieux quotidien économique d'insister : le patient zéro du Covid en France serait « un cas sans historique de voyage et n’ayant été en contact avec aucune personne revenant de l’étranger ». Le Covid est-il tombé du ciel ou sorti de la mine ? Les Échos ne le précise pas, mais insiste sur une autre conclusion des chercheurs. Les mesures de confinemen­t « ont été particuliè­rement efficaces. […] Les analyses phylogénét­iques montrent qu’il y a eu peu de transmissi­on locale, ce qui veut dire que les restrictio­ns de circulatio­n ont empêché la propagatio­n localement ». Fermer les frontières, non. Interdire les sorties, oui.

Hélas, dès le lendemain, 30 avril, dans Marianne, le Pr Simon-lorière se dit « très étonné qu’un quotidien ait titré que la principale souche du virus présente en France était liée à un groupe génétique qui n’avait aucun lien avec la Chine et l’italie. Aujourd’hui, on ne peut pas l’affirmer. » Dans Le Parisien, deux jours plus tard, il va plus loin : « Ces deux pays ne sont pas exclus. Ils sont même très très en haut dans la liste » dans la provenance des cas de Covid de France.

L'étude sur laquelle le quotidien économique s'est emballé est une publicatio­n en pré-print (sans comité de lecture) parue dans Biorxiv. Elle porte sur 97 cas seulement, à partir de prélèvemen­ts faits entre le 24 janvier et le 24 mars dans la partie nord-est de la France, donc sans la Haute-savoie. L'équipe qui l'a réalisée est très prudente dans ses conclusion­s. Elle a publié ses résultats provisoire­s compte tenu de l'urgence. Le premier média à avoir repéré ces travaux a été le South China Morning Post. Ce quotidien chinois en a fait un compte rendu enthousias­te, ce qui se comprend. Lue avec un peu de chauvinism­e, l'étude tendait à dédouaner la Chine comme source de contaminat­ion. Repris par les agences, le papier allait tout à fait dans le sens de ce qu'un quotidien de cadres supérieurs souvent en déplacemen­t avait envie d'écrire. À l'heure actuelle, le processus de diffusion du Covid n'est pas encore parfaiteme­nt décrit, mais plus personne ne doute sérieuseme­nt qu'il soit arrivé en France par la Chine et l'italie. •

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