Causeur

Twittos talibans

- Par Gabrielle Périer

« Zabihullah Mujahid de l’émirat islamique tient une conférence de presse à 17h » ; « Un comité tripartite a été mis en place à Kaboul pour rassurer les médias » ; « L’émirat islamique souhaite de meilleures relations diplomatiq­ues et commercial­es avec tous les pays »... Certes, ses tweets sont aussi insipides que ceux du ministère de la Transition écologique français : Zabihullah Mujahid, porte-parole officiel des talibans, sait se conformer aux règles les plus strictes de la bienséance langagière. Il n’empêche qu’il reste libre de diffuser autant de messages qu’il veut par jour sur Twitter à ses plus de 300 000 abonnés. Très critiqué pour ne pas avoir fermé les comptes des responsabl­es talibans, le réseau social a expliqué que ces derniers n’avaient pas enfreint ses règles sur les contenus violents. Pourtant, pendant les vingt ans d’occupation par les forces de L’OTAN, les talibans ont frénétique­ment utilisé les médias sociaux pour établir leur légitimité auprès de la population afghane. L’ironie c’est que, jusqu’en 2002, les mêmes talibans interdisai­ent l’accès à internet ; s’il s’est généralisé aujourd’hui, c’est grâce aux efforts des Occidentau­x pour moderniser l’infrastruc­ture du pays. Cette année, au cours de la reconquête qui a culminé avec la prise de Kaboul, les talibans ont encore profité des plateforme­s, notamment Whatsapp, filiale de Facebook, pour coordonner certaines de leurs opérations et diffuser des messages, voire des menaces, aux chefs locaux, sommés de coopérer. Facebook a banni les talibans officielle­ment il y a longtemps ; Youtube annonce redoubler ses efforts pour enlever des vidéos postées à leur gloire ; et Whatsapp vient de déclarer sa déterminat­ion de bloquer les numéros associés à leurs groupes. Ce qui n’empêche pas les talibans et leurs supporteur­s de continuer à créer de nouveaux comptes. Pendant ce temps, Twitter autorise la promotion du nouveau régime qui entend se forger une image plus « modérée », plus « respectabl­e », plus « lisse », et complèteme­nt fausse. En France le compte de Jean Messiha (et d’autres) est toujours suspendu. •

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France