Le mur de la dette se rapproche pour Drahi
Près de huit mois après le début du scandale de corruption qui a fait vaciller l’empire de Patrick Drahi, la proposition de rachat d’Altice Media par Rodolphe Saadé ne pouvait se refuser. Cet été, le milliardaire des télécoms a promis aux investisseurs de n’avoir plus qu’un objectif : le désendettement. Valorisant le pôle à 1,5 milliard de dollars, l’offre représente 14 fois son résultat brut d’exploitation.
« On s’attendait plutôt à la vente d'un actif télécom, mais il s’agit d’un très bon prix, d’une valorisation élevée », décrypte Franck Abihssira, spécialiste médias et télécoms au cabinet de conseil Emerton. Car la pression se maintient sur le groupe, pressé par une dette de près de 60 milliards d’euros, dont 24 milliards en France. Le milliardaire s’active depuis septembre pour céder des morceaux d’Altice et en tirer le maximum. La vente des 257 centres de données en novembre à la banque Morgan Stanley pour 530 millions d’euros a posé un premier jalon sur le long chemin du désendettement. Avec la cession des actifs médias, le groupe franchit une étape qui donne du crédit à la stratégie exposée par Drahi.
« L’opération montre qu’il est sincère dans sa démarche et prêt à se séparer d’actifs auxquels il est très attaché », analyse un bon connaisseur du dossier. Le 1,5 milliard tiré d’Altice Media permettra de faire face aux maturités courtes : les premières échéances sont fixées à 2025 et 2026, avec respectivement 1,65 et 1,33 milliard d’euros. Les suivantes sont vertigineuses. En 2027, le groupe doit rembourser 5,48 milliards d’euros, quasiment le double en 2028, avec 9,42 milliards, puis 6,34 milliards en 2029. La vente d’Altice Media offre du temps à Drahi, qui espère ainsi rassurer les marchés. Signe de l’urgence, les cessions s’accélèrent ces dernières semaines. Six fonds sont sur les rangs pour acquérir les 50% du capital d’Altice dans XpFibre, l’opérateur de réseau de fibre optique valorisé à 9 milliards d’euros. Selon une source, la vente pourrait avoir lieu dans les deux prochains mois. Autre actif, l’opérateur Meo au Portugal, valorisé à 7,4 milliards d’euros, suscite notamment les convoitises de l’opérateur saoudien STC. Quant à SFR, sa vente s’avère délicate, la valorisation à 24 milliards étant égale à la dette. Et il faudrait attendre 2025 au moins, selon notre source, pour voir un actionnaire entrer à son capital.