Renault et PSA ont pris la pente de la délocalisation
Depuis 2010, le déficit du commerce automobile français ne cesse de plonger : 15,4 milliards d'euros en 2020, 18 milliards en 2021, 19,9 milliards en 2022, 24 milliards en 2023. L’automobile représente près de la moitié du déficit tricolore des produits manufacturés ! En 2004, la filière affichait pourtant un excédent de 12,3 milliards. Les Français aiment certes les Volkswagen, Audi, Mercedes – d’où le déséquilibre de la balance avec l’Allemagne
(-6,4 milliards en 2023). Mais l’Hexagone nourrit surtout un énorme déficit vis-à-vis de l’Espagne, la Slovaquie, la Roumanie et le Maroc (-11 milliards cumulés). La raison essentielle? Les délocalisations de Renault et PSA (devenu Stellantis en 2021). Le creusement du déficit est en effet corrélé à la chute des fabrications dans l’Hexagone. La France n’a produit qu’un peu plus de 1,5 million de véhicules l’an dernier, contre 3,66 millions en 2004. Quant aux seules voitures électriques, « elles sont très minoritairement produites en France », lâche Marc Mortureux, directeur général de la Plateforme automobile française (PFA). Et sur les dix modèles les plus vendus dans l’Hexagone en 2023, un seul était made en France, la Peugeot 308. La Renault Clio? Produite à Bursa (Turquie) et Novo Mesto (Slovénie). Sa rivale, la Peugeot 208? Assemblée à Trnava (Slovaquie), y compris la variante électrique, et Kenitra (Maroc). Les petits SUV Peugeot 2008 et Renault Captur? En Espagne.
Cette délocalisation des années 2010 à début 2020 s’explique principalement par le coût du travail en France. Car Renault comme l’ex-PSA sont spécialistes des petits modèles, les plus sensibles aux prix. Le coût salarial horaire dans l’industrie manufacturière est 4,5 fois plus bas en Roumanie, où sont produites la plupart des Dacia à bas coûts, qu’en France, trois fois moindre en Slovaquie. Le différentiel entre l’Espagne et la France est de 40 %, selon le cabinet Rexecode. Certes, Renault a cédé à la pression de l’Etat actionnaire – à hauteur de 15% – pour produire dans le Nord sa prochaine R5 électrique. Mais Carlos Tavares a dit non à Bruno Le Maire, lorsque le ministre de l’Economie lui a demandé à l’été 2023 de suivre l’exemple : « Stellantis est en condition de se battre contre les chinois, mais ce ne serait pas le cas si on produisait dans des pays à coûts élevés », a affirmé lapidairement le directeur général de Stellantis.