Challenges

Chamatex court le monde avec son tissu tech

Une fibre révolution­naire brevetée, une usine dernier cri : en dix ans, la PME ardéchoise a réussi son virage stratégiqu­e. Et doublé son chiffre d’affaires hors de France.

- Laure Croiset

Nichée à 400 mètres d’altitude audessus de la rivière L’Ay, à Ardoix (Ardèche du Nord), et non loin de la résidence de son fondateur JeanClaude Montagnon en 1980, la société Chamatex a émergé d’un bassin textile sinistré grâce au virage stratégiqu­e enclenché par son nouveau président, Gilles Reguillon. Signe de cette réussite : en juin 2023, le site a reçu la visite du président Emmanuel Macron dans le cadre du plan France 2030 visant la reconquête industriel­le tricolore. « Une reconnaiss­ance et une grande fierté » pour son dirigeant.

De l’Europe au Japon

Depuis sa reprise en main en 2011, Gilles Reguillon a multiplié par huit le chiffre d’affaires de Chamatex, pour atteindre 55 millions d’euros l’an dernier. L’entreprise, qui emploie 350 collaborat­eurs, est désormais rentable. « La stratégie que j’ai mise en place est claire, soutient ce dirigeant aussi dynamique que franc. Sortir le textile du textile standard en inscrivant l’innovation au coeur de notre ADN. » Un tournant gagnant. Sa division Chamatex Textile, « locomotive du groupe », a doublé en dix ans son chiffre à l’export, passant de 30 à 60% de son chiffre d’affaires (24 millions en 2023). « Le secret pour durer dans le textile passe par l’innovation, mais pas seulement, poursuit le patron. Il faut renverser la table tous les jours en tant que dirigeant et c’est un travail de titan de toute une équipe. » Si il vend majoritair­ement en Europe, Chamatex dessert également les EtatsUnis, le Japon, l’Australie et la NouvelleZé­lande. « Nous sommes le champion de l’export sur les tissus destinés aux chaussures de sport et les vêtements tissus antifeu pour la Formule 1 », assure Gilles Reguillon.

Après trois ans de tests, son tissu révolution­naire Matryx a été breveté en 2014, puis lancé commercial­ement en 2016 avec des baskets de la marque lyonnaise spécialisé­e dans les sports de raquette Babolat. « Nous avons fait gagner 100 grammes à une paire de chaussures en améliorant la respirabil­ité, la durabilité et tout en gardant ses propriétés de maintien », affirme le dirigeant, qui consacre 5 % de son chiffre d’affaires à la R&D. Cette fibre innovante est désormais utilisée par trente marques, dont la moitié est étrangère, comme l’équipement­ier américain NoBull ou la griffe italienne Diadora, pour une dizaine de discipline­s sportives. L’entreprise a notamment su tirer son épingle du jeu grâce au lancement en 2018 de WeLab, un laboratoir­e miniature qui permet de créer des prototypes en un temps record.

Concept dupliqué au Portugal

Mais Chamatex vise encore plus loin. En 2021, l’entreprise ardéchoise a inauguré sur son site historique d’Ardoix une usine de 3 000 m2 entièremen­t automatisé­e, ASF 4.0. Dotée de cinq îlots de machines ultraperfo­rmantes, elle y fabrique intégralem­ent des paires de basket pour les marques Salomon et Millet. L’année dernière, 50 000 paires sont déjà sorties de cette usine. Son objectif ? « Devenir le numéro un européen de la chaussure de sport » en multiplian­t par cinq la cadence d’ici à 2025. Pour y parvenir, Gilles Reguillon prévoit de dupliquer son concept en HauteSavoi­e, puis au Portugal. Depuis Ardoix, bourg de 1200 habitants, Chamatex n’en finit pas de pousser les murs pour conquérir le monde.

 ?? ?? Emmanuel Macron en visite dans l’usine ASF 4.0 de Chamatex, en juin 2023, à Ardoix. Montré en exemple par le président, le site, doté de cinq îlots de machines ultraperfo­rmantes, fabrique des paires de basket pour Salomon et Millet.
Emmanuel Macron en visite dans l’usine ASF 4.0 de Chamatex, en juin 2023, à Ardoix. Montré en exemple par le président, le site, doté de cinq îlots de machines ultraperfo­rmantes, fabrique des paires de basket pour Salomon et Millet.

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