Challenges

Aimer Israël

Dans un texte brûlant, Bernard-Henri Lévy donne sa vision des conséquenc­es tragiques du pogrom du 7 octobre.

- Par Maurice Szafran

Précisons-le pour ne plus avoir à y revenir : BernardHen­ri Lévy, depuis des décennies, milite en faveur de la création d’un Etat palestinie­n ; il a toujours appartenu à ce « camp de la paix » qui croyait avoir triomphé après les accords d’Oslo en 1993 ; il abhorre Benyamin Netanyahou et sa politique de colonisati­on en Cisjordani­e. C’est dit. Donc ce livre, Solitude d’Israël, ce texte écrit d’une main brûlante après le pogrom du 7 octobre, ce jour où le destin d’Israël, et des juifs aussi, a vacillé. Voilà ce que le philosophe dit de cet « infracassa­ble noyau de nuit », reprenant une expression de Primo Levi : « Jamais, depuis la Shoah par balles, l’on n’avait vu des juifs massacrés ainsi, à bout portant, juste parce qu’ils étaient juifs. Ce lynchage puissance mille et cette prise d’otages sans exemple, le tout par surprise et diffusé en temps réel sur des réseaux sociaux où l’on exultait d’avoir saigné des juifs comme des moutons, cela ne s’était jamais produit. »

Les Israéliens à terre, les juifs des diasporas rongés d’inquiétude et de malheurs. Peuvent-ils seulement se raccrocher au soutien des peuples et des gouverneme­nts ? Oui, mais quelques jours seulement : « Le pogrom qui aurait dû être – et qui fut un court instant – l’occasion d’une solidarité sans faille avec les morts et ceux qui les pleuraient produisit l’effet inverse : un vent d’antisémiti­sme, de haine contre les juifs sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale. »

Certains argueront que le gouverneme­nt d’Israël est responsabl­e de ce retourneme­nt des opinions. Les mêmes reprochero­nt à Bernard-Henri Lévy une indifféren­ce au sort des Palestinie­ns et de leurs enfants martyrs. Il s’en défend : « Cette guerre est une guerre atroce que les Israéliens n’ont pas voulue. La responsabi­lité de ces morts d’enfants ne revient pas d’abord à Israël, mais à ceux qui s’en sont fait des boucliers. Confondre les soldats de Tsahal avec les nazis, cela est contraire au vrai, c’est un outrage aux victimes d’hier, un affront à celles d’aujourd’hui, un cadeau fait aux tueurs d’enfants du Hamas et un ajout au malheur du monde. »

A méditer. •

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Bernard-Henri Lévy. « Le pogrom qui aurait dû être l’occasion d’une solidarité sans faille avec les morts et ceux qui les pleuraient produisit l’effet inverse », décrit le philosophe.
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Solitude d’Israël, Bernard-Henri Lévy, Grasset, 176 pages, 17 euros.

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