La French Tech manque encore d’impact sur l’économie
L’écosystème a grandi et fait éclore de beaux succès. Mais même les licornes restent loin des valeurs du CAC 40. Flécher l’épargne des Français permettrait de massifier l’investissement.
Emmanuel Macron rêve de faire de la France une « start-up nation ». Mais, malgré son volontarisme et les financements par le biais de Bpifrance et du plan France 2030, le bilan est mitigé. Côté positif, un véritable écosystème s’est développé, structuré : en vingt ans, une cinquantaine de sociétés tech valant plus d’1 milliard d’euros ont émergé, dont une vingtaine valent plus de 2 milliards. Les acteurs du capital-risque se sont multipliés, professionnalisés, et les levées de fonds atteignent aujourd’hui la dizaine de milliards d’euros annuels, contre 1 milliard en 2013. Les start-up contribuent à la numérisation de l’économie, bousculant les usages dans la finance, le commerce, les services, la santé. Deux tiers des Français utilisent au moins une fois par mois un service proposé par une start-up, que ce soit Doctolib, Deezer, Lydia ou ManoMano. Mais, par nature, il faut semer beaucoup pour récolter un peu : au bout de quatre ans, 50 % des jeunes pousses ont disparu, 71 % au bout de dix ans. Et surtout, au niveau macroéconomique, leur poids dans l’économie tricolore reste faible. Dans le Top-10 des entreprises les plus valorisées au monde, on trouve en numéro un Microsoft (3 100 milliards de dollars de capitalisation), puis Apple, Google, Amazon ou Facebook, des Big Tech qui ont démarré dans des garages de la Silicon Valley. En France, les start-up les plus établies, Doctolib ou Back Market, sont valorisées 6 à 7 milliards d’euros, encore loin du CAC 40. On compte 13 000 start-up, contre 159 000 PME, elles emploient 500 000 salariés, moins de 2,5 % de l’emploi dans l’Hexagone, c’est honorable, mais assez marginal. Certes, celles qui survivent croissent bien plus vite que la masse des entreprises, mais l’impact sur la croissance du PIB reste superficiel. Et ce n’est que récemment que les startup sont sorties du seul terrain de jeu des services numériques pour s’attaquer à des projets plus impactants, comme la décarbonation de l’économie, à vrai contenu scientifique, avec des perspectives industrielles. Pour changer de dimension et vraiment peser, il faudrait plus d’investisseurs prêts à prendre des tickets à plus de 100 millions pour accélérer la croissance des pépites. Mais la France n’a pas de fonds de pension et, plus globalement, les épargnants y ont une grande aversion au risque. Le grand défi serait d’orienter vers les start-up l’épargne accumulée dans les livrets A ou l’assurance-vie. Malgré les efforts des pouvoirs publics en ce sens, l’argent privé reste frileux. •