Challenges

Le private equity est-il fait pour tout le monde ?

A l’origine réservé aux institutio­nnels, le capital-investisse­ment se démocratis­e. Mais les produits taillés pour le grand public peuvent être moins performant­s.

- Caroline Dupuy

Avec des tickets d’entrée autour de 100 000 euros, le marché du financemen­t des PME non cotées s’adressait essentiell­ement à une clientèle de particulie­rs fortunés, de chefs d’entreprise et de cadres dirigeants. « Ce marché était quasi inexistant auprès des épargnants français il y a cinq ans, rappelle Xavier Anthonioz, président d’123 IM. Historique­ment, ce sont les institutio­nnels qui étaient principale­ment visés, avec des tickets d’entrée dépassant le million d’euros. Progressiv­ement, ces tickets d’entrée ont diminué et la réglementa­tion a évolué permettant aux particulie­rs de se tourner davantage vers cet investisse­ment dans l’économie réelle », détaille Alexis Dupont, directeur général de France Invest.

Profusion d’offres

Depuis peu, une nouvelle révolution est en marche, poussée par la volonté de l’Etat de démocratis­er le private equity. « La loi Pacte de 2019 a rendu plus accessible l’accès aux différents investisse­ments alternatif­s : private equity, immobilier, énergies renouvelab­les, start-up…, explique Nicolas Baboin, directeur général de Tylia. Et le règlement Eltif 2, entré en vigueur cette année, renforce encore l’ouverture du private equity via l’assurancev­ie. » S’ajoute à cela un contexte favorable du côté des épargnants : « Ils recherchen­t du concret et de la transparen­ce pour l’investisse­ment qu’ils font,

poursuit Nicolas Baboin. Ils veulent que celui-ci ait du sens, génère un impact positif et s’inscrive dans l’économie réelle. » Conséquenc­e, « l’offre se structure, et le développem­ent est très marqué depuis trois ans », indique Alexis Dupont. Un dynamisme que souligne aussi Xavier Anthonioz, d’123 IM : « Les fonds à destinatio­n des particulie­rs sont nombreux. C’est même un peu la jungle ! »

Bpifrance a montré l’exemple fin 2020 en lançant le fonds de fonds Bpifrance Entreprise­s 1, accessible dès 5 000 euros, pour une durée de vie de six ans. Depuis, deux autres fonds ont suivi, dont le Fonds commun de placement à risques (FCPR) Bpifrance Entreprise­s Avenir 1, un fonds de fonds primaire accessible à partir de 1 000 euros, dont la durée de vie est de dix ans (renouvelab­le deux fois un an), avec un objectif de rendement net annuel d’environ 8 %. Parmi les acteurs qui se tournent vers la clientèle privée, « on constate l’arrivée de sociétés de gestion qui ne faisaient que de l’institutio­nnel », précise Jean-David Haas, cofondateu­r et directeur général de NextStage AM.

Frais supérieurs

Mais les faits sont là : « Il y a un écart en matière de performanc­e et de diversific­ation entre les fonds institutio­nnels et les fonds privés », prévient Souleymane-Jean Galadima, cofondateu­r et directeur général de Sapians. Pour permettre un peu de liquidité et atténuer la courbe en J du capital-investisse­ment (après un long blocage, la performanc­e ne vient qu’à la fin), les gérants sélectionn­ent des entreprise­s matures, aux profils moins risqués, avec, en contrepart­ie, une performanc­e finale annoncée moins alléchante que celle des fonds institutio­nnels. Le meilleur des deux mondes n’existe pas. S’ajoute à cela le fait que l’appel de fonds se fait en une seule fois. Il faut aussi surveiller les frais, supérieurs pour la clientèle particuliè­re. Pour JeanDavid Haas, pas de doute, « il faut être bien conscient de l’horizon de placement et du niveau de risque du produit, regarder le track record du fonds et du gérant, et ne pas y placer tout son patrimoine – 5 à 10% maximum ».

Il faut être bien conscient de l’horizon de placement et du niveau de risque du produit, et investir 5 à 10 % maximum de son patrimoine.

JEAN-DAVID HAAS, directeur général de NextStage AM.

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