Comment éviter le greenwashing ?
De nombreuses sociétés de gestion assurent avoir une politique d’investissement responsable, mais les définitions et les exigences ne sont pas les mêmes partout.
Depuis une quinzaine d’années, la finance s’est mise au vert. C’est même devenu un concours à quel placement sera le plus écolo. Mais certains établissements étaient davantage guidés par des coups marketing que par une réelle ambition durable. Pour y mettre un peu d’ordre, la France avait donc créé en 2016 le label ISR (Investissement socialement responsable), attribué par un comité et vérifié par un auditeur indépendant. De quoi donner un gage de sérieux aux produits vendus. Un véritable succès, puisque le nombre de fonds labellisés a grimpé en flèche : moins de cinq ans après la création, plus de 1 000 fonds étaient labellisés (voir graphique). Sauf que le label de 2016 a fini par être jugé trop peu contraignant : il
Les gens pouvaient avoir un ressenti de greenwashing en découvrant du TotalEnergies dans leurs fonds ISR, mais ce n’était pas interdit avec l’ancienne mouture du label.
GRÉGOIRE COUSTÉ, délégué général du Forum de l’investissement responsable.
Financer quelque chose de très vert, c’est très bien. Mais il faut aussi financer la transition avec des entreprises qui ne sont pas encore durables mais qui progressent sur le sujet.
OPHÉLIE MORTIER, stratégiste de l'investissement responsable chez Degroof Petercam AM.
n’avait pas de politique d’exclusion, notamment sur les énergies fossiles, ce qui pouvait entraîner une incompréhension du grand public. Lors d’une conférence organisée fin février par Kaori, le contrat d’assurancevie responsable du Secours Catholique, Grégoire Cousté, le délégué général du Forum de l’investissement responsable le résumait ainsi : « Les gens pouvaient avoir un ressenti de greenwashing en découvrant du TotalEnergies dans leurs fonds labellisés ISR. Avec le nouveau label, ce sera plus clair. »
Label français
Car le label ISR vient d’être refondu. Les énergies fossiles sont désormais exclues et les exigences sont plus élevées. De quoi faire renoncer un certain nombre de maisons : « Un fonds peut être durable, mais il DOIT être rentable », assène le patron d’une société de gestion, qui n’est pas sûr de redemander le label ISR nouvelle mouture. D’autres avancent un principe de réalisme : « Financer quelque chose de très vert, c’est très bien. Mais il faut aussi financer la transition avec des entreprises qui ne sont pas encore durables mais qui progressent sur le sujet », explique Ophélie Mortier, responsable de la stratégie d’investissement responsable chez Degroof Petercam AM.
Norme européenne
L’Union européenne a voulu également clarifier le sujet en imposant la norme Sustainable Finance Disclosure Regulation (SFDR), entrée en vigueur depuis 2021, et qui classe les fonds en trois catégories, selon leur degré d’engagement extrafinancier : les fonds catégorie article 8, dits « vert clair », qui intègrent des critères environnementaux et/ou sociaux dans leur gestion, et les fonds article 9 (« vert foncé ») s’ils poursuivent un objectif de développement durable. Les fonds n’intégrant pas de critères particuliers de finance durable sont dits article 6. Mais petit couac l’année dernière : plus de 400 fonds qui s’étaient déclarés article 9 ont finalement décidé de se requalifier en article 8 depuis.
Pour éviter le greenwashing (écoblanchiment en français), le label français et la classification européenne sont déjà de bons indicateurs au moment de choisir tel ou tel fonds, mais cela ne doit pas empêcher l’épargnant de vérifier régulièrement que les produits qu’il a sélectionnés sont bien en ligne avec ses objectifs et son propre degré d’engagement dans l’ISR, en consultant les rapports de gestion qui donnent les éléments essentiels du placement. ▶