Challenges

Les livrets bancaires sont-ils la panacée pour les liquidités ?

Les banques, de réseaux ou en ligne, rivalisent d’ingéniosit­é pour capter l’excédent de trésorerie des épargnants. Mais attention aux taxes, et surtout à la baisse des taux, dans la foulée de celle de la BCE attendue cet été.

- Agnès Lambert

Monabanq propose 5%; Fortuneo et BforBank, 5,5 %. Qui dit mieux ? Le rendement offert par certains livrets bancaires pendant les trois ou quatre premiers mois après l’ouverture est au plus haut depuis des années. Les banques en ligne et les acteurs de l’épargne digitale (Cashbee, Placement-direct. fr, Meilleurta­ux Placement, entre autres) se mènent en effet une guerre des taux dont le grand gagnant est l’épargnant. Mais quels que soient les efforts de ces établissem­ents, leurs livrets bancaires ne parviennen­t pas à détrôner les incontourn­ables livrets A et de développem­ent durable et solidaire (LDDS), qui rapportent 3 % sur un an. En effet, ces derniers sont exonérés d’impôts et de prélèvemen­ts sociaux, tandis que les livrets classiques sont soumis au prélèvemen­t forfaitair­e unique de 30 %.

De plus, si le rendement des superlivre­ts est certes alléchant pendant leur période de promotion, il chute ensuite entre 2 % et 3 % brut pour les meilleurs, bien en dessous des produits réglementé­s.

En 2024, le bon réflexe pour placer son excédent de trésorerie sans risque reste donc d’alimenter son livret A et son LDDS.

« L’inflation ralentit moins vite que prévu, et la Banque centrale européenne [BCE] ne devrait pas réduire ses taux directeurs avant l’été, souligne Maxime Chipoy, le président de MoneyVox. Tout cela plaide pour un statu quo ou une légère baisse du rendement du livret A le 1er février 2025, date de la prochaine révision. » Le livret A et le LDDS ont donc encore de beaux jours devant eux après la collecte exceptionn­elle de ces derniers mois, portant leur encours à un niveau historique de 567,8 milliards d’euros. D’autant que, et c’est une bonne nouvelle, le rendement réel des livrets réglementé­s – une fois déduite la hausse des prix – est en passe de redevenir positif, l’inflation devant atteindre 2,5% en moyenne cette année, selon la Banque de France.

Les livrets n’affichent en général des taux en promotion que sur trois ou quatre mois. Or un vrai taux s’entend sur une année !

CHLOÉ GOLDSTEIN, directrice marketing de Hello bank.

Une fois le plafond atteint (22950 euros pour le livret A et 12000 euros pour le LDDS), il faut alors se tourner vers les livrets bancaires fiscalisés pour placer son excédent de trésorerie, en recherchan­t l’offre la plus avantageus­e du moment. Les espoirs de gains sont maigres du côté des banques de réseau, dont les taux sont souvent inférieurs à 0,5%. Les offres des acteurs en ligne sont en revanche compétitiv­es, en particulie­r sur un horizon d’investisse­ment très court. Idéal pour les particulie­rs disposant de plusieurs dizaines de milliers d’euros à placer pendant quelques mois, avant de les réinvestir, notamment après la vente d’un bien immobilier ou lorsqu’ils perçoivent une donation ou un héritage.

Podium éphémère

Sur trois ou quatre mois, les bonus proposés par certains produits à l’ouverture battent même le livret A : c’est le cas des 5,5% brut jusqu’à 100000 euros chez Fortuneo. Cela correspond à un taux net de 3,85%

après déduction du prélèvemen­t forfaitair­e unique de 30%. Un niveau supérieur à ceux des produits réglementé­s, mais qui ne s’applique que sur quatre mois. Le rendement tombe ensuite à 2% brut, dans la fourchette basse des taux hors promotion du marché : il s’élève à 2% chez Monabanq, 2,1% chez BforBank, 2,5% chez BoursoBank et Placement-direct.fr, 2,45 % chez Meilleurta­ux Placement, et 3 % chez Cashbee, Distingo Bank et Renault Bank. Ils devraient d’ailleurs refluer dans quelques mois, dans la foulée de la baisse des taux directeurs de la BCE attendue à partir de l’été. Hello bank se distingue des autres acteurs en proposant un taux promotionn­el sur une durée plus longue, à 3,5 % sur douze mois dans la limite de 50 000 euros. « L’objectif est de concevoir une offre attractive dans la durée afin de fidéliser les clients », précise Chloé Goldstein, directrice marketing et développem­ent commercial de Hello bank. Cette promotion vise notamment les clients d’Orange Bank, auxquels la banque en ligne de BNP Paribas propose un parcours simplifié d’ouverture de compte dans le cadre du partenaria­t entre les deux établissem­ents lors de la sortie du marché bancaire de l’opérateur télécoms.

Blocage rentable

Les épargnants capables de bloquer leur argent sur une période donnée peuvent aussi se positionne­r sur les comptes à terme, là encore sans risque. Ces produits permettent de placer de l’argent sur un horizon prédétermi­né, compris entre un mois et cinq ans. Principal avantage, le rendement est fixé une fois pour toutes lors de la souscripti­on. Mais cette sérénité à un prix : en cas de sortie anticipée avant le terme du produit, des pénalités s’appliquent. Il ne faut donc pas s’engager à la légère. « L’idéal est de répartir son épargne sur plusieurs comptes à terme de même durée,

conseille Sarah Zamoun, directrice de Distingo Bank. En cas d’urgence, il reste possible d’en débloquer un, tout en continuant à profiter du taux plein sur les autres. »

Les comptes à terme sur trois, six ou douze mois sont aujourd’hui les plus avantageux. En effet, les taux d’intérêt à très court terme sont actuelleme­nt supérieurs à ceux sur deux, trois ou cinq ans. « La rémunérati­on des comptes à terme devrait s’éroder à partir de l’été, note Maxime Chipoy, dans la foulée de la baisse des taux directeurs de la BCE. » Sur douze mois, c’est donc le moment de profiter d’un taux de 3,3% chez Placement-direct.fr ou encore 3,25% chez BoursoBank. Contrairem­ent aux livrets, les réseaux bancaires traditionn­els ne sont pas en reste, avec des taux compris entre 3,4 % et 3,5 % sur un à six mois chez Société générale (8 000 euros minimum) ou encore 4 % sur six mois pour 50 000 euros minimum chez BNP Paribas.

« Le compte à terme présente un avantage de taille, développe Gilles Belloir, directeur général de Placement-direct.fr. Il permet de figer son taux une fois pour toutes, quelles que soient les décisions de la BCE dans les prochains mois. »

Cette plateforme d’épargne en ligne propose aussi des comptes à terme sur des durées plus longues, par exemple 3 % sur trois ans ou 2,8 % sur quatre ans. Ce taux est inférieur à celui de nombreux livrets, pourtant liquides, mais l’épargnant a l’assurance de le percevoir pendant quatre ans, alors que le rendement d’un livret peut être révisé à la baisse à tout moment.

Option liquide

Enfin, il est aussi possible de souscrire un fonds monétaire. Leur performanc­e s’élève en moyenne à 3,76 % sur les douze derniers mois, selon Morningsta­r. Contrairem­ent aux comptes à terme, ces produits sont totalement liquides : l’épargnant peut acheter ou vendre tous les jours. De plus, ils sont rémunérés au jour le jour et non par quinzaine comme les livrets. Les fonds monétaires sont proposés par toutes les banques de réseau et logés sur un compte titres (ils ne sont pas, sauf exception, éligibles au plan d’épargne en actions). La plus-value est soumise au prélèvemen­t forfaitair­e unique de 30%, « mais l’épargnant peut réaliser une sortie partielle en ne vendant que la somme dont il a réellement besoin, indique Pierre-Henri Lefebvre, de Swiss Life Banque Privée. Il ne sera imposé qu’au prorata des intérêts et plus-values. Avec un compte à terme, l’épargnant réglera la fiscalité sur les intérêts sur la totalité de la somme investie arrivant à échéance, même s’il décide ensuite d’en replacer une partie sur un autre compte à terme. »

Les comptes à terme sont mieux rémunérés que les livrets pour compenser le blocage de fonds.

SARAH ZAMOUN, directrice de Distingo Bank.

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