Leçon de tragédie
La doyenne des actrices nous fait goûter le verbe du dramaturge à travers ses plus grandes tirades.
Judith prend Racine au Poche
En duo, Judith Magre (doyenne des actrices françaises en activité) et Olivier Barrot offrent, avec la complicité du metteur en scène Thierry Harcourt, un récital mettant à l’honneur de grandes tirades du répertoire classique tirées de six des onze tragédies écrites par Jean Racine : Andromaque (1667), Britannicus (1669), Bérénice (1670), Bajazet (1672), Phèdre (1677) et Athalie (1691).
Le jeu de mots du titre souligne la fidélité de la comédienne à l’un des plus petits théâtres de Paris, dirigé par Stéphanie Tesson dans le quartier de Montparnasse, et rend hommage par homonymie au plus célèbre tragédien du Grand Siècle, avec Corneille. Si la mémoire collective associe leurs noms, 33 ans pourtant séparent les deux dramaturges que tout oppose. Loin de sombrer dans le mode « cours du soir », Olivier Barrot le rappelle avec sa verve
inimitable, dans des interventions documentées d’une rigoureuse précision pédagogique qui ponctuent le spectacle en contextualisant les morceaux choisis.
Un lutrin et une table basse composent le sobre décor. Beau jeu de lumières. On est au royaume d’Eros et de Thanatos où le verbe poétique est roi. Mademoiselle Magre, 97 ans, rayonne. Robe de velours noire signée Mine Vergès. Imposant pendentif doré. Son rouge à lèvres vif rappelle le rideau de fond du plateau. Prêtant sa voix aux héroïnes sacrifiées sur l’autel de l’amour, la grande prêtresse captive le public dans une ferveur quasi physique. Un moment suspendu. •