Langage haut en couleur
Les fantaisies lexicales de Queneau sont à l’honneur dans un conte musical décapant.
Publié en 1959, Zazie dans le métro – roman de Raymond Queneau (1903-1976) porté à l’écran par Louis Malle avec Catherine Demongeot et Philippe Noiret – reste une pertinente parabole poétique sur l’horreur du monde urbain et l’absurdité de la vie moderne. Stimulante malice de la « mouflette » forte en gueule, qui termine ses phrases par « mon cul » et boit du « cacocalo ». Certaines thématiques, jusque-là jugées secondaires, retiennent notre attention. Tel le rapport avec les hommes adultes de cette préadolescente de 10-12 ans que son père tenta de violer, et que sa mère, pour rejoindre son « jules », confie à son oncle Gabriel (Franck Vincent). Avec lui, pas de crainte, il est « hormosessuel » ! L’Oulipien Queneau nous régale de fantaisies lexicales à un rythme ludique effréné, fustigeant les « cochoncetés » et autres « vicelar
dises » autant qu’il (dé)construit le langage. « Tu causes, tu causes, c’est tout ce que tu sais faire », commente un perroquet.
La petite provinciale qui espérait « s’aller voiturer dans l’métro » en sera quitte : il y a grève. Cela n’empêche pas le récit initiatique d’avancer. « J’ai vieilli », conclura-t-elle à l’issue de son bref séjour parisien. Zabou Breitman et Reinhardt Wagner, après Poil de carotte (2019), ont conçu un conte musical coloré, porté par l’endiablée Alexandra Datman (Zazie) avec six musiciens sur scène. En avant la zizique ! •