À la table de Thomas Danigo
Embrassez le divin ailleurs
Galanga ! Ce nom exotique est une exhortation au voyage mais pas seulement. C’est surtout une invitation à vous asseoir à une belle table parisienne, celle de l’hôtel Monsieur George. Son chef est un globetrotteur. Et si vous en doutez, goûtez maintenant.
Nous sommes au lendemain du confinement. Un jour de mai. Paris s’éveille et semble sortir de sa torpeur de deux mois d’hibernation. L’hôtel Monsieur George au 17, rue Washington, dans le VIIIE arrondissement de la ville Lumière, sort doucement de ce sommeil profond. Lui aussi, mais pour d’autres raisons.
Les travaux sont finis, bien qu’il reste çà et là quelques retouches à peaufiner, Monsieur George prépare son habit de fête pour ouvrir ses portes au public en ce mois de septembre. Voisin de l’avenue des Champs-élysées, ce boutique-hôtel 5 étoiles est une parure scintillante de haute couture. Nous le rappellent les jeux de matières et la couleur dominante du vert émeraude qui se diffuse dans les jeux de miroirs et de verrières dès que l’on passe la porte de ce lieu enchanteur. Anoushka Hempel signe son premier chantier parisien. Enfin, un peu de Hempel à Paris ! C’est l’addition de l’atemporel et de l’élégance même. Avec une touche britannique. So chic !
On vient pour une nuit, un verre, un mets délicat ou encore pour le Tigre. Cette institution du yoga, installée en sein même du spa de l’hôtel, nous propose de suspendre le temps, de faire l’expérience du relâchement, de se sentir bijou dans un écrin délicat.
Détendue et grisée par l’atmosphère ambiante, je suis invitée à la table de Monsieur George, le restaurant-bar Galanga. Cette épice au nom singulier proche du gingembre exprime à elle seule qui est le chef Thomas Danigo. Ici, c’est lui l’artisan du goût. À seulement 28 ans, ce globe-trotteur présente une carte qui vous invite aux voyages.
Originaire de Chartres « parce qu’il faut bien définir un port d’attache », Thomas est « d’un peu partout » finalement. Dès ses 13 ans, il part outre-atlantique, tout au nord, au Canada. Il y découvre une ouverture d’esprit qui l’accompagnera toute sa vie, avive en lui une dynamique fertile et éveille l’inspiration.
De retour en France, avec un bac sport-études ski en poche, étonnamment, le sportif s’interroge sur ce qu’il aime faire et ce qu’il aime être.
Les moments passés à la campagne avec sa grand-mère participent profondément de ce questionnement auquel répond, comme une évidence, la gastronomie. Sa proximité avec le terroir et son goût à satisfaire les palais décident de sa vocation.
« Partager un repas est le moyen le plus fort pour vous accueillir à l’étranger. » Thomas trouve en ce métier ce qui l’anime le plus : tutoyer de nouveaux horizons et appliquer une discipline, presque sportive, au service de la complicité avec son hôte. Ce désir de voyager s’inscrit intensément dans son assiette par une touche d’exotisme. Je comprends immédiatement que
l’association Galanga et Thomas Danigo forment non pas un mariage de raison mais d’amour.
Ce jeune chef a fait ses gammes chez Alain Pégouret au Laurent. Après quelques années de collaboration et être passé par les différentes étapes de formation dans la brigade de ce chef étoilé, il prend son envol en 2019.
Son bagage à la main, Thomas s’installe derrière le piano du Galanga en mars dernier. « Ici, on ne cherche pas l’étoile mais on souhaite faire une cuisine chic, sans prétention et pleine de saveurs. Nos maîtres mots sont : le goût, la fraîcheur et la légèreté. »
En témoigne le plat que la chef prépare devant moi pour la rédaction de ces quelques lignes et vous lecteurs de Chasses Internationales. Un plat de gibier, un « chevreuil tir d’été » grillé au genévrier, navet confit, girolles et cerises en giboulée. Le chef m’apparaît quelques instants comme un joaillier appliqué à sa création. Il réalise une pièce unique, là devant mes yeux.
Son geste est sublime, sans ostentation, juste. C’est la modestie de l’artisan. À la différence près, qu’à l’inverse du bijou qu’on ne peut (mal) heureusement pas croquer, ce plat de gibier peut quant à lui être goûté. Et quel délice ! Imaginez donc cet instant suspendu dans lequel le monde de la forêt vient embrasser votre palais. Et quelle n’est pas ma surprise quand Thomas me confesse ne pas bien connaître le « gibier de la terre ». Il m’évoque une autre sorte de “gibier”, celui de la mer. Le goût prononcé du rouget et de l’oursin, par exemple, l’oblige « à réfléchir afin d’équilibrer dans l’assiette les caractères de chaque composante. Et, cela, tout en respectant la saisonnalité des produits associés. » Défi et respect de la nature, très séduisant !
Thomas aime à évoquer qu’il pratique une « cuisine de la régression ». Elle est simple, fait plaisir et affiche une identité légèrement asiatique et japonisante.
Je vous l’avoue, difficile de quitter les lieux après une telle rencontre dans un décor aussi superbement orchestré. Mais je le quitte ! Galanga est une sorte de trait d’union entre le tumulte parisien qui m’accueille à la sortie et les horizons lointains et délicats vers lesquels je viens de m’évader.
■
◆ Monsieur George - Galanga restaurant-bar 17, rue Washington, Paris VIIIE.
Rens. : 01.87.89.48.48 et www.monsieurgeorge.com