La Diane Béatrice Beysson De Saules
“La chasse est une de nos libertés !”
Elle ne confond pas tout, a plaisir à transmettre, refuse la mauvaise foi. Chasser apaise l’esprit, aiguise les sens, favorise l’amitié, lie les générations. Cette diane de coeur ne comprendrait pas qu’une écologie punitive prive les chasseurs, acteurs des équilibres de nos campagnes, d’une liberté fondamentale.
Quel est votre premier souvenir de chasse ?
J’ai approché la nature à l’âge de 10 ans grâce à la montagne, la chasse est venue ensuite. J’ai accompagné mon père dans ses quêtes dans le massif de Belledone qui a été mon terrain de jeu une grande partie de mon enfance. Nous avons fait de belles approches au chamois, au chevreuil dans le massif de la Chartreuse et du Vercors. Nous avons crapahuté dans tous les massifs forestiers autour de Grenoble. En réalité, mon père et maman étaient des fondus de montagne. Maman a d’ailleurs fêté ses 30 ans dans la Barre des Écrins devant une crevasse. Mon père estimait qu’il fallait donner de soi afin d’apprécier, qu’il fallait partir à la découverte. Un jour, il s’est mis à la chasse. Je l’ai découverte au travers de ses yeux car je n’avais pas le droit de prendre la carabine. Je n’étais pas douée pour l’observation, il m’a appris à voir les chamois qui nous entouraient. J’avais une complicité totale avec lui. Je me suis nourrie de sa connaissance et de la convivialité qu’il entretenait avec ses amis chasseurs. Le tir, lui, est survenu dans un second temps en rencontrant des chasseurs. J’ai abordé cet univers sans savoir au départ s’il allait me plaire.
Vous êtes passée de l’observation à la chasse. Ce sont deux quêtes distinctes ?
Mon père m’enseigna que la chasse faisait partie du cycle de la vie. Il m’expliqua le rôle que les chasseurs endossaient dans l’équilibre des populations de chamois, des cerfs, des sangliers. J’ai découvert plus tard d’autres types de chasse de grands animaux, en revanche pas du tout la plume. C’est assez atypique pour une diane. J’ai côtoyé des chasseurs expérimentés, appréhendé des modes de chasse différents dans divers pays. J’ai des souvenirs de mon premier impala en Afrique. J’ai partagé ce baptême avec un tout jeune garçon qui lui aussi faisait ses gammes. Et il me dit: « Maintenant, je t’attends à la plume. » Et là, je me suis interrogée sur le terme… Coïncidence, je l’ai retrouvé quelques années plus tard à… la plume !
Vous avez chassé sur différents continents…
Une fois que j’ai quitté les semelles de mon père et que j’ai vécu ma vie d’adolescente et de femme, j’ai passé mon temps à concourir tous les week-ends afin de qualifier nos chevaux. La chasse devint secondaire. Néanmoins, avec une amie cavalière, très énergique, très libre, très authentique, nous partions seules dans le massif de la Chartreuse chasser dans la forêt. La chasse était alors pour moi l’aventure, nous étions autonomes. Nous avons fait une dizaine de sorties sans tirer une seule fois. Nous faisions des quêtes d’observation. J’ai fait la connaissance d’un grand chasseur, d’un fin chasseur avec lequel j’ai découvert d’autres horizons et surtout partagé dans le respect de l’animal. J’ai acquis la notion de belle balle, bonne balle, une seule balle. Un animal, pas de souffrance. Choisir ou s’abstenir de tirer. Ce fut un mentor d’éthique et de rigueur à laquelle j’ai toujours souscrit. J’ai des souvenirs d’émerveillement en Afrique. De mon premier buffle notamment et de la fête qui s’ensuivit. C’est à cet instant précis que j’ai su que j’étais un chasseur. J’ai chassé effectivement dans différents pays: en Angleterre, en Irlande, au Canada, en Norvège, en Russie, dans de nombreux pays en Afrique. Sur le continent africain, j’ai été très émue par la violence du braconnage, son impunité aussi. En revanche, la chasse en Angleterre, dans son art de vivre, son dress code, sa pratique, a représenté le graal.
Quel est votre plus beau souvenir ?
Celui que je vais vivre à la rentrée. Je vais tirer un chamois avec mon guide et ami. Ce sera un hommage à mon père de pouvoir retourner dans le massif de Belledonne et à ce qu’il m’a transmis. Je me suis toujours demandé si je serais encore capable de faire ce qu’il m’a enseigné. Ces escalades, passer sur les névés, traverser les éboulis, enjamber les rochers, glisser dans les cheminées et tirer une seule balle.
Quels conseils donneriez-vous aux Dianes qui ne chassent que la plume ?
Avec de la patience et de la rigueur, chacune d’entre nous est apte à aborder n’importe quelle chasse aux grands gibiers. Je suggérerais de commencer par le chevreuil à l’approche. Cette
Que pensez-vous du RIP réclamant la fin de la chasse à courre ?
espèce est d’une curiosité incroyable, assez répandue dans nos campagnes, permettant un tir précis sur un animal arrêté. C’est une chasse qui ne nécessite pas un gros calibre. Il faut être sûre de son arme, toujours la faire régler avant de chasser et être précise quelle que soit la taille de l’animal. Chasser le cerf à l’approche est pour moi une expérience inoubliable. J’insiste, la précision du tir est primordiale. Blesser un animal, c’est le faire souffrir et se mettre en danger. Le grand gibier nécessite de maîtriser sa peur. Les femmes savent, peut-être plus que certains hommes, gérer cette pression, l’adrénaline que procure la rencontre avec un animal. Nous semblons plus calmes, plus apaisées. L’esprit de compétition masculine peut parfois nuire dans la précision. Nous essayons de privilégier la qualité du tir et recherchons une belle émotion.
Que dire à ces femmes qui accompagnent sans décider de chasser ?
La chasse est une histoire d’amour et de transmission. Celles qui “suivent” mais ne chassent pas, n’ont pas encore reçu cette transmission. Les femmes qui ne parviennent pas à passer à l’acte doivent prendre confiance. Aujourd’hui le plaisir de chasser la plume avec le cercle Dianes Only par exemple est immense. Ce groupe est une façon de transmettre à nos amies qui adorent la campagne, la chasse, la convivialité. Cette initiative de chasse de femmes marque un tournant dans l’intégration à notre univers. La chasse est un des rares sports où nous sommes très solidaires, bienveillantes. Il n’y a pas de jugement, juste de la joie.
Pendant très longtemps, nous avons balayé d’un revers de main le sujet. Nous vivions nos traditions. Nous avons été de mauvais communicants. Aujourd’hui, nous avons vraiment besoin de nous rassembler et de combattre avec des arguments, avec méthode, la dérive animaliste qui voudrait nous priver de nos libertés. Ces visions restrictives de nos modes de vie sont un danger. Notre priorité est l’union sacrée. Nous ne sommes plus attaqués au coin du bois mais par une espèce d’écologie avec des déclinaisons réglementaires, des catalogues d’interdictions, de taxes et d’amendes qui doivent être combattus. La défense des chasseurs passe par un engagement et une vision politique. Je suis une femme de loi. L’écologie punitive doit être contestée sur le terrain politique. Derrière la défense du bien-être auquel tout le monde souscrit, des thèses environnementales, des modèles véganes se cachent des idées fallacieuses, pas très démocratiques. C’est la liberté, les particularismes régionaux et la diversité des territoires qui sont attaqués ! Des pans de l’économie locale sont menacés. Nous avons à la tête des chasseurs un homme de caractère et d’énergie. Willy Schraen portent nos valeurs. Associations, fédérations, acteurs de la vie rurale… il faut le soutenir afin de rétablir le dialogue. Je ne veux pas que la chasse devienne un “musée”. Gaston Phoebus clamait : « Touches-y, si tu l’oses ! » Ils ont osé, nous devons réagir et ne plus nous taire. C’est le cas d’antoine Cohen-potin, président du Cercle Gaston Phoebus. Il s’engage depuis vingt-cinq ans afin de sensibiliser les politiques à ces enjeux.
Faut-il adopter une posture offensive, défensive ou pédagogique ?
Il faut susciter des rencontres, relancer peutêtre l’idée d’un Grenelle de la ruralité. Le dialogue avec les écologistes les plus radicaux est aujourd’hui rompu. Le retour récent vers la campagne amplifié par la pandémie doit être une aubaine pour la chasse afin de redéfinir le rôle et l’utilité de chacun dans la nature. Elle est un maillon essentiel des territoires. Qui entretient les forêts, replante des haies, protège l’agriculture, les zones humides et régule ?
Imaginons qu’un adolescent lise cette interview dans cinquante ans. Qu’aimeriez-vous qu’il en retienne ?
J’aimerais surtout qu’il ait encore le bonheur de pratiquer une des chasses que j’ai eu la chance de découvrir. Cela voudra dire que la transmission et nos libertés existent toujours.
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