Chantal Trocmé
Objet masculin du désir, le couteau qu’il soit à vocation utilitaire ou artistique n’est jamais le reflet d’une acquisition anodine. Aimer un couteau, c’est en prendre soin et le protéger. Chantal Trocmé est partie de l’idée simple que tout bel objet mérite un écrin à sa mesure, et que le couteau est de ceux-là. Apporter une dose de féminité dans cet univers masculin, y adjoindre une note d’esthétisme et de personnalité est la gageure qu’elle s’impose depuis maintenant une dizaine d’années. Dans son Atelier Cotécuir, l’étui est le prolongement de l’objet, une mise en valeur, un tout.
C’est un peu par hasard, dans le cadre d’une reconversion qu’elle découvre simultanément le cuir et le couteau. Né d’un rêve, taquiner le beau, elle s’exerce aux rudiments du métier du cuir chez un sous-traitant de la célèbre maison de luxe à la française Hermès. Parallèlement, elle part en exploratrice à Coutellia, salon de coutellerie du coeur thiernois qui jouissait encore à l’époque d’une image de marque flatteuse. Devant le constat d’une offre extrêmement limitée et peu goûteuse d’originalité, Chantal Trocmé renforcée dans l’idée, somme toute saugrenue, de ne retenir dans l’univers du cuir que l’étui pour couteaux comme domaine d’excellence, s’est imposée par son audace discrète dans ce monde du métal, du franc-parler et de rudesse.
Tête de gondole d’une petite entreprise familiale installée en Bourgogne dans la campagne du Haut-mâconnais, elle est accompagnée depuis longtemps de sa fille Céline qui vient de la rejoindre définitivement dans l’aventure de l’atelier Cotécuir. Elles forment un duo redoutable de charme, de gentillesse et de savoir-faire.
Jouant avec le cuir, elles lui apportent un souffle de fraîcheur en osant des associations parfois déroutantes, aucunement excentriques, et toujours au combien réussies. La dernière collection, savant mélange de feutrine de laine et de cuir coloré, en est la parfaite illustration. L’atelier sélectionne à l’unité les meilleurs cuirs réservés aux grandes maisons de luxe. Chantal Trocmé familiarise le couteau au croco, à l’hippopotame, à l’autruche, au python, au requin, à autant de matériaux exotiques que l’on associe d’ordinaire plus aisément à la maroquinerie de luxe. Ces cuirs sont acquis en conformité avec les lois sur la protection des espèces protégées issues de la convention Cites, ce qui induit que la plupart de ceux-ci sont issus de fermes d’élevage ou régulés par des quotas. Les peaux plus classiques, veau, agneau, buffle… qu’elle utilise également en doublure pour ses trousses de rangements, proviennent de tanneries françaises du Pays basque ou d’alsace. Autant dire que l’entreprise Atelier Côtécuir est devenue experte en sur-mesure et qu’aucun habit pour couteau ne lui est impossible à réaliser.
Cette souplesse a su conquérir les envies parfois loufoques des amateurs pour les traduire avec élégance et harmonie. Chantal et Céline Trocmé ne sont pas adeptes de maximisation. Pour autant, l’atelier fabrique toujours pour les professionnels et leur offre une multitude de possibilités de se fournir dans les différentes gammes proposées, ou de concevoir des modèles concertés dont le design restera l’exclusivité du coutelier. ■