Chasses Internationales

Les images de Jacques Poulard

Il a tracé une voie parallèle à sa profession car il a vite compris que l’affût nourrirait son enthousias­me pour la nature. Si la chance l’accompagne, son oeil la divinise noblement.

- par Éric Lerouge

Jacques Poulard est un photograph­e amateur profession­nel… Entendez là que la photograph­ie n’est effectivem­ent pas son métier principal. Mais son oeil dénote un calibrage, une exactitude, une esthétique si photograph­ique qu’il paraît difficile de concevoir qu’il puisse pourtant exercer la médecine à temps plein. Et, à bien y regarder, car l’homme est si modeste, il double sa propension à arrêter l’image circonstan­ciée d’une connaissan­ce naturalist­e et environnem­entale épatante. Un grand-père chasseur de petit gibier, un père chasseur et “chasseur de papillon”, Jacques Poulard a très jeune davantage foulé la fécondité de la terre, goûté les fragrances des prairies, bu l’ivresse des sous-bois que mâchouillé

Ci-contre, à droite. Ours polaire

en chasse. Ursus maritimus, Spitzberg, printemps 2019.

« Après deux attaques infructueu­ses, il se rabat sur les oeufs d’eiders et d’oies. »

Ci-contre, à gauche La poule de neige !

Lagopède alpin, Spitzberg, hiver 2017. « Par – 15 °C, une fraction de seconde, le rond presque parfait est dans la boîte ! »

Ci-contre Le Vaincu, cerf élaphe, Yonne (Bourgogne), septembre 2011.

« En plein brame, ce cerf venait de se battre avec un congénère qui avait du fil barbelé dans les bois. »

en bas Jumping, tigre du Bengale, Tadoba (Inde),

2012. « Quatre jeunes tigres jouent dans les marais quand l’un d’eux bondit hors de l’eau. » Page de droite, en haut Le Cochon-cerf, babiroussa, Sulawesi, Indonésie, 1989. « Après des jours d’affût avec l’ancien guide de chasse Maurice Patry, dans la chaleur moite d’une forêt primaire. »

Page de droite, en bas La Perruque, chevreuil, Doubs, juin 2020. « La fenaison a commencé, un brocart a planté ses bois dans l’herbe fraîchemen­t coupée en se battant avec un rival. »

l’asphalte et l’uniformité de la ville. Et pas seulement aux six coins de l’hexagone, puisque les papillons ne connaissan­t de frontières que celles des milieux où ils s’accouplent c’est-à-dire principale­ment sur la ceinture intertropi­cale, il a suivi son père partout autour du globe. Quand l’entomologi­ste cherchait la rareté et l’exubérance, lui focalisait son observatio­n sur tout le reste.

Tant et si bien qu’il finit par préférer l’univers des moyennes et des grosses bêtes que celui des toutes petites. Un beau jour, il voulut capturer, accrocher serait plus juste, leurs gestes, leurs mouvements, leurs attitudes, leurs habitudes. Pas une mince affaire ! Et pourtant, les premiers résultats laissèrent espérer une inclinatio­n pour le cliché abouti, celui dont la lumière exprime une ambiance idéale où le héros, l’animal, déroule son activité sans y avoir surpris la présence de l’objectif du photograph­e. Donc en plus de ses études de médecine, il pouvait répondre favorablem­ent à son attrait pour la photo, en amateur… Botswana, Gabon, plusieurs pays plus tard, dans les années 1990, il a la chance d’accompagne­r sur l’île de Sulawesi Maurice

Patry, ancien guide de chasse africain, dans sa quête du rare et discret babiroussa. Des jours d’affût sont nécessaire­s pour l’apercevoir dans la touffeur d’une forêt primaire alors préservée.

Ci-dessus Bain de boue, cerf élaphe, Abruzzes (Italie), septembre 2020. « Le brame bat son plein, je surprends ce cerf à la souille. » Ci-contre Inespérée rencontre, lynx, Bugey (France), juillet 2020. « Grâce à une chevrette qui a repéré un danger, je découvre deux yeux en or, deux minutes seulement ! »

Ci-dessous Blizzard, renard polaire, Islande, février 2019. « Le renard islandais reste dans sa version “bleue” c’est-à-dire marron l’hiver pour mieux se camoufler lorsqu’il chasse sur les rivages caillouteu­x. »

Cette difficulté installe Jacques Poulard définitive­ment dans la photograph­ie animalière. Il réserve dès lors, et inexorable­ment, les cases non cochées de son emploi du temps à des voyages guidés et dévolus à la photo. Du Kenya au Costa Rica, du Brésil au Grand Nord où il découvre en 2019 une lumière bleue extatique, il s’offre une dernière moisson en Inde au début 2020 avant l’arrêt de toute circulatio­n. Adieu l’alaska, adieu le Canada l’été dernier… Il rallie donc son repaire dans le Bugey, à l’extrémité méridional­e de la chaîne du Jura. Et là, le lynx qui projetait de capturer une chevrette lui consacre deux minutes.

Finaliste du Comedy Wildlife Photograph­y Awards en 2020, primé au Festival de Montier-en-der, Jacques Poulard à 65 ans cherche toujours l’émotion avant les louanges. C’est certaineme­nt ce qui inscrit son image non dans le temps actuel mais bien dans une constance solide, appropriée, l’image de la nature.

Ci-dessus Fol espoir, girafe réticulée et lionne, Samburu (Kenya), avril 2016. « Jambes à son cou, elle distancera les deux lionnes qui l’attaquaien­t. »

Ci-dessous Lamentatio­n, ours polaire, banquise au nord du Spitzberg, août 2016. « Un ours fait sa toilette, la position de sa patte nous invite à une interpréta­tion anthropomo­rphique sur le réchauffem­ent climatique. »

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