Ateliers Perrault
Les Ateliers Perrault ont fêté l’an dernier 260 ans, lui 34. Installés en Anjou depuis toujours, ils sont spécialisés dans la charpenterie, la menuiserie, l’ébénisterie, la ferronnerie et la serrurerie d’art. À leur rachat par Ateliers de France en 2019, il en a pris la tête. Ce qui le séduit ? Leur taille humaine et leur philosophie intacte : « Nous construisons le futur avec la mémoire du passé. »
Que pensez-vous de la chasse ? Est-elle un acteur de la vie rurale ?
Je ne suis pas chasseur bien que des amis chasseurs déposent régulièrement chez nous des cuissots de chevreuil ou de sanglier, que nous avons toujours plaisir à cuisiner. La dernière fois que j’ai assisté à une chasse, une très belle chasse, elle avait lieu au Luxembourg. Je me suis vu offrir une patte de chevreuil chassé ce jour-là. Je l’ai conservée. Ce fut un moment d’évasion, j’ai apprécié les contacts avec les chasseurs, la passion qui les anime mais aussi le mélange des milieux sociaux. Si l’occasion se présente, ce sera une joie de renouveler l’expérience.
Que pensez-vous des attaques dont la chasse fait l’objet ?
Je suis très surpris des attaques de la part des animalistes, végans, antispécistes. La chasse est bénéfique en toute logique à la nature. Elle est garante de sa régénération. Les chasseurs ne sont tout de même pas des bandits ou des tireurs échevelés qui porteraient atteinte à la survie de la faune. Je pense que ces personnes radicalisées sont en mal de croyance, en manque d’idéal et qu’ils inventent leur propre religion. Imposer de ne plus manger de viande me semble absurde et tellement peu à-propos.
Parlez-nous de votre parcours…
En sortant de mon école d’ingénieur, je suis entré chez Bouygues. Ce fut une expérience formatrice mais je souhaitais évoluer dans une entreprise à taille plus humaine. J’ai intégré l’atelier Meriguet à Paris, entreprise de restauration de monuments historiques spécialiste en dorure, peinture et décoration. J’y ai passé trois ans. J’ai toujours été attiré par les vieilles pierres. J’ai donc suivi mon instinct et je ne le regrette pas. Cette maison fait partie d’une structure plus importante, Ateliers de France, qui réunit cinquante entités du patrimoine et du luxe qui portent des savoir-faire dans tous les corps de métier. L’atelier Meriguet en est la maison-mère. Je suis donc parti dans une des filiales à Londres, l’atelier Premiere London, que j’ai dirigé pendant quatre ans. Puis nous avons racheté Hare & Humphreys, qui restaure les bâtiments de la couronne britannique. Ce fut très enrichissant, l’architecture et la culture du patrimoine sont abordées différemment. En 2019, je suis rentré en France pour prendre la direction des Ateliers Perrault en Anjou à Mauges-sur-loire qui venaient d’être racheté par Ateliers de France.
Présentez-nous les Ateliers Perrault ? Vous venez de fêter vos 260 ans…
Nos savoir-faire s’expriment autour du bois et de l’acier et concernent la charpente, la menuiserie et la forge. La maison, à sa création en 1760, fabriquait des roues en bois ferrées de charrette et de carrosse. Elle s’est adaptée aux époques, a transmis ses savoir-faire de génération en génération. Aujourd’hui l’entreprise familiale réalise un chiffre d’affaires autour de 15 millions d’euros, compte 150 salariés (des compagnons, des ébénistes, des charpentiers…) qui évoluent en France et à l’étranger. Nous concevons des projets de milliers à des millions d’euros. Du particulier donc à des chantiers prestigieux de monuments historiques publics et privés comme l’hôtel du Palais à Biarritz ou les châteaux de Chambord et Chantilly, le Mont Saint-michel et peutêtre un jour Notre-dame dès que l’offre publique sera lancée… Les Ateliers Perrault en plus d’être EPV font partie du Groupement des entreprises de restauration des Monuments historiques (GMH)
Quel est le périmètre de vos actions ? Qui sont ceux qui font les Ateliers ?
En premier lieu, la charpente et la restauration ou la restitution des monuments historiques ; ensuite la menuiserie d’extérieur : de la fenêtre aux escaliers, du porche au parquet dans tous les styles du XVE siècle à aujourd’hui ; puis la boiserie en restauration ou en neuf ; et enfin la forge avec des balustrades, des balcons, des grilles et ce nous appelons la quincaillerie, de la crémone à l’espagnolette. Tous nos artisans ne sont pas des compagnons mais disposent de
formation d’ébéniste, de menuisier. Tous sont passionnés par leur métier. Nos équipes sont constituées d’apprentis et d’artisans qui peuvent avoir trente-quarante ans de métier.
D’où provient la matière première ?
Nous utilisons essentiellement le chêne en charpente et en menuiserie. Autrefois les Ateliers Perrault allaient choisir sur pied, en forêt donc. Aujourd’hui, nous faisons appel à des scieurs mais nous avons de gros stocks avec des poutres de grosses sections pour les charpentes, des plateaux pour les menuiseries, des bois frais de sciage, ressuyé et sec de plus de quinze ans.
Peut-on concilier les techniques anciennes et modernes tout en respectant le patrimoine ?
Oui, et il est impérieux de le faire.
Nous respectons le style mais les menuiseries, par exemple, intègrent l’antiinfraction, la domotique, le vitrage thermique, acoustique voire chauffant. La charpente demeure, elle, traditionnelle. Elle est structurelle. L’outil moderne a donc fait son entrée, nous utilisons des grues par exemple. Les Ateliers Perrault, ce sont leur spécificité, construisent les charpentes dans leurs ateliers, les livrent en convoi exceptionnel avant de les déposer sur le bâti comme un chapeau.
Comment travaillent vos architectes, votre bureau d’études afin de respecter les charpentes, les portes, les plafonds, les ferronneries, les escaliers originaux… ?
Les Ateliers Perrault ont des savoirs transmis d’homme à homme. Nous sommes détenteurs d’une culture de l’architecture. Nous possédons des archives que la famille Perrault a fait évoluer au fil des années, qui réunissent des milliers d’ouvrages sur nos métiers. Nous avons aussi un bureau d’études important et des personnes qui travaillent sur chaque chantier en menuiserie et en charpente. Nous utilisons des logiciels 3D afin que nos clients se projettent plus facilement dans la mise en oeuvre de leur chantier. Les savoir-faire intègrent l’outil numérique sans altérer l’original afin d’en faciliter la réalisation. L’outil de travail est évolutif mais pas l’oeuvre en elle-même. En menuiserie, c’est certainement plus flagrant. Nous sommes une des deux entreprises en France à avoir L’EPV pare-balles des menuiseries extérieures des appartements privés des présidents qui quittent leur fonction. Nous parvenons à allier la technicité au goût, c’est notre force.
Privé, public, quelle est la proportion de vos interventions ?
En fonction des années et des projets, notre clientèle public/privé est partagée équitablement. Bien sûr nous travaillons pour le privé, bien sûr la renommée passe par les chantiers prestigieux publics. J’ai tendance à dire que nous sommes un gros artisan.
Comment protège-t-on les savoirs et comment assurez-vous leur transmission ?
La transmission s’assure d’homme à homme. Nous avons entre dix et quinze apprentis. Même dans cette période de crise, nous continuons à former les jeunes. Devenir charpentier nécessite dix ans de pratique au sein des Ateliers Perrault. Nous fidélisons nos équipes, nous leur offrons des évolutions.
Quel est votre message pour l’avenir ?
Un message d’espoir. L’entreprise a connu en 260 ans bien des épreuves. Cette épidémie en est une nouvelle mais nous avons appris à traverser ces moments difficiles. Nos équipes poursuivent leur mission avec la même passion et la même foi en leur savoir-faire afin de régénérer et préserver l’âme de tous les chantiers sur lesquels ils interviennent.
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