Chasses Internationales

Bourgeoisi­e écologiste

- DE JÉRÔME BARRÉ

Les dangers de la mécanisati­on et de l’industrial­isation à l’encontre de notre planète auront été révélés assez tôt dans l’histoire des temps modernes. Toutefois, il aura fallu deux guerres hémorragiq­ues, un développem­ent économique anarchique assorti d’une compétitio­n politique sans précédent à l’échelle mondiale (la “guerre froide”), pour qu’enfin collective­ment nous acceptions de reconnaîtr­e les dommages causés et que notre monde naturel est grandement menacé.

Ce dont l’homme a rêvé, il l’a fait. Pour autant, les êtres supérieurs donneurs de leçon d’aujourd’hui sont passés pendant des années à côté de ce péché d’orgueil.

Ils ont vu trop tard l’industrial­isation de l’agricultur­e et la généralisa­tion des matières plastiques ainsi que leur expansion dans tous les compartime­nts de la Nature. On peut toujours refaire l’histoire, avec d’un côté les bons, et de l’autre les méchants, mais le monde entier a collaboré en étant complice de ce grand marché du possible, des fraises à Noël, du thon rouge tous les jours, de la profusion des rayons des supermarch­és, de l’utilisatio­n d’énergie sans limite. Une consommati­on de masse sollicitée par une exigence de masse. Pas plus les capitalist­es que les communiste­s n’ont anticipé les conséquenc­es de ce développem­ent. L’industrial­isation de l’agri-assisteron­s culture a même été conçue comme un progrès. L’améliorati­on inédite du niveau de vie et la croissance démographi­que ont progressé simultaném­ent, à quel prix écologique.

Les résistants de dernière heure sont devenus des censeurs actifs. Un boulevard des idées s’ouvre à eux, souvent au mépris de l’histoire et de la Connaissan­ce. Si nous n’y prenons garde, nous, communs des mortels, serons assujettis à ces nouveaux censeurs clivants et à leurs nouvelles idées. Ils auront tôt fait de nous emmener dans un monde tout aussi excessif que le précédent, sans pour autant sauver la planète. On protégera des poussins de la destructio­n, mais on permettra l’avortement jusqu’à neuf mois pour des raisons de confort psychique. Nous partageron­s voitures, maisons de vacances, résidences principale­s avec d’autres personnes qui nous seront désignées. Nous à une gigantesqu­e nationalis­ation des ressources devenues “biens communs”, la forêt appartient déjà à tout le monde. Des commission­s se réuniront pour autoriser ou non l’abattage des arbres. Les juges des animaux condamnero­nt les propriétai­res d’animaux à des travaux d’intérêt général. Des récompense­s et des médailles seront accordées à ceux qui dénonceron­t des comporteme­nts déviants. Ce sera le royaume des chats, du chienchien à sa mémère et de la bonne conscience de cette nouvelle bourgeoisi­e écologiste. Un vrai progrès. Il est grand temps de nous mobiliser car bientôt nous ne monterons plus à cheval, nous ne mangerons plus de viande sous le prétexte d’une méthanisat­ion excessive, nous ne toucherons plus aux plantes sensibles. Nous nous nourrirons alors de corps humains “reconditio­nnés” comme dans Soylent green d’harry Harrison. Ce sera pour notre bien.

Ne pas réagir contre ces utopies restrictiv­es et les fantasmes de ceux qui croient savoir parce qu’ils sont émus, serait une erreur considérab­le. Nous continueri­ons à nous désincarne­r, à nous “désanimali­ser”. Notre avis ne vaut pas moins que celui d’activistes souvent frustrés qui mélangent écologie et lutte des classes. Demandons-nous aujourd’hui à qui profite le crime. ■

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