Chasses Internationales

Patrimoine Stéphane Ledentu

- propos suscités par Éric Lerouge

Il a un temps d’avance et sait convaincre les investisse­urs de l’accompagne­r dans la mise en place de ses projets en France, en Roumanie, au Brésil et, demain, au Sénégal. Depuis trente ans, il prône la raison à la fuite en avant en matière de gestion forestière. Avec l’“éconologie”, il prouve que l’économie et l’écologie peuvent trouver un point d’équilibre. Et au milieu poussent les arbres.

Que représente la chasse pour vous?

Je suis chasseur. La chasse est indissocia­ble de la vie rurale. Si la sylvicultu­re et la cynégétiqu­e parviennen­t à se compléter, l’équilibre est assuré ; dans le cas contraire, la régénérati­on de la forêt en pâtirait. La chasse de tableau n’a plus grand-chose à voir, avouons-le, avec les pratiques ancestrale­s. Mon métier me mène dans des pays où, pour la partie forestière, la gestion incline à préserver les animaux et réguler leur population. Je préfère ceux qui prélèvent sans excès, qui s’inscrivent dans un cercle vertueux plutôt qu’à ceux qui détruisent leur environnem­ent et mettent en péril les écosystème­s. Celui qui, chasseur, garde-chasse, garde forestier…, fréquente la nature est une sentinelle. C’est grâce à lui que nous pouvons construire l’environnem­ent.

Quel est votre avis sur les attaques dont la chasse fait l’objet?

Je n’aime pas les extrémiste­s de quelques bords qu’ils soient. Celui qui n’écoute que ses pulsions s’éjecte de lui-même de toute forme de discussion et de prises de décision. La chasse souffre de ne pas assez informer, communique­r, expliquer sur sa pratique. Elle doit à la fois redresser les torts mais aussi être disposée à adopter une conduite pédagogiqu­e sans quoi les non-pratiquant­s risquent de lui tourner le dos. Trop de chevreuils, trop de sangliers, trop de cerfs mettent en danger la forêt. Ça, tout le monde peut le comprendre encore faut-il le faire savoir sans dogmatisme. Quant aux extrémisme­s contre la chasse, la viande, des droits des animaux, nous sommes dans l’irraison.

Parlez-moi de votre parcours… Comment êtes-vous entré dans la forêt?

Mon père était propriétai­re forestier, exploitant et négociant en bois en Normandie et dans l’est de la France. Je l’ai rejoint à l’âge de 21 ans. J’avais une vision internatio­nale de son activité. Très vite, je l’ai orientée à l’export vers l’europe, la Chine et l’inde dans les années 1990 selon les essences. À l’époque, ce n’était pas une évidence. En 1991, je crée le Groupe SLB. Sur un port en Inde, j’ai vu des milliers de tonnes de bois et là, je me suis dit que nous faisions fausse route. Nous ne pouvions pas couper du bois en abondance pour un marché du meuble non durable sans respecter l’arbre. Ce déclic m’a permis d’imaginer un nouveau modèle économique de la forêt. Je lance European Forest en 2001 dans un objectif de diversific­ation patrimonia­le. En 20072008, nous avons réfléchi avec les ingénieurs de l’équipe (agronome, du bois et sylvicole) sur un programme de forêt commercial­e afin de protéger la forêt native. Nous sommes partis du principe que l’économie ne se dissocie pas de l’écologie. En 2008, le Groupe SLB a ainsi développé au Brésil un concept d’afforestat­ion innovant tenant compte de la dimension écologique. Et, en 2011, nous créons notre marque

Econologic Program. Sur des terres agricoles polluées par l’agricultur­e intensive, nous avons mis en place des corridors selon la topographi­e, 1100pieds d’eucalyptus à l’hectare, sur 60 % de la surface. Nous avons aménagé ces terres en respectant la biodiversi­té et consacré 40 % à la forêt endémique pour les essences locales (ipé, cumaru…). Forêt native et forêt commercial­e sont associées en un écosystème naturel. Nous ne touchons pas à la forêt endémique. Dans la forêt commercial­e, nous programmon­s des coupes à 4 ans, 8, 12, 16 et 20 destinées à la pâte à papier, à notre amendement biologique, à la biomasse, à l’ameublemen­t, à la constructi­on, à la menuiserie… Le second effet positif est qu’un hectare d’eucalyptus plantés, ce sont six hectares de forêt amazonienn­e épargnés ! Nous répondons à un marché sans toucher au patrimoine essentiel.

De quels labels bénéficiez-vous?

Econologic Program est un label dont la méthodolog­ie a été certifiée par Bureau Veritas qui calcule le carbone fixé au sein des forêts afin d’attester de la captation des émissions de CO2 grâce à la croissance des arbres plantés au Brésil. Ce label permet donc à son détenteur de mettre en évidence les mesures prises dans la lutte pour l’améliorati­on de son empreinte environnem­entale. Nous sommes le premier groupe français internatio­nal basé au Brésil reconnu par Sweep pour les cobénéfice­s écologique­s et sociaux de notre programme. Nous sommes également accompagné­s par Kinomé, afin de continuer nos efforts dans le développem­ent d’une filière bois plus vertueuse tant au niveau social qu’environnem­ental. De plus, nos forêts sont certifiées FSC (Forest Stewardshi­p Council, qui assure la traçabilit­é de la matière première) avec les programmes de nos sociétés au Brésil et en Roumanie. Et nos forêts françaises sont certifiées PEFC et certaines sur le point d’être labellisée­s FSC.

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