Les vétos à la rescousse
S'il fallait trouver une vertu à l'interminable pandémie de Covid qui, depuis plus d'un an, gâche nos vies, ce serait de nous rappeler, à nous, « pauvres humains » (comme disait François Villon), notre appartenance au monde animal. Du moins, entre notre espèce et les espèces animales, la barrière est-elle ténue. Les virus, microbes, bactéries et parasites en tous genres la franchissent allègrement. Si l'on ignore toujours la véritable origine du virus qui galope aujourd'hui d'un continent à l'autre, tous les spécialistes s'accordent à dire qu'il a transité, à un moment ou à un autre, par un ou plusieurs animaux. Grippe porcine, vache folle, grippe aviaire : on se souvient de ces antécédents, qui avaient entraîné, « par précaution », le massacre de milliers de vaches, de millions de poules. Récemment, une alerte à l'émergence d'une forme de SARS-CoV-2 dans un élevage de visons au Danemark s'est soldée par l'élimination de 17 millions de ces petites bêtes à fourrure ! Beaucoup de cavaliers se sont mis à trembler lorsque, fin février, des cas de contamination de chevaux ont été signalés en Espagne, atteints d'une maladie, la rhinopneumonie (EHV-1), que certains journaux ont comparé au Covid humain. Les milieux vétérinaires n'avaient pas attendu ce mouvement de panique pour s'intéresser au sujet. Lors de la première vague venue de Chine, alors que tous les laboratoires d'analyses médicales se trouvaient submergés, ils n'hésitèrent pas à faire appel à leurs confrères vétérinaires, qui étaient parfaitement compétents pour analyser les échantillons humains. Le Conseil Scientifique, mis en place par le ministère de la Santé pour « éclairer » les décideurs politiques, s'est enfin décidé à inviter en son sein un vétérinaire, le Dr Thierry Lefrançois. C'est un pas dans le bons sens. La maladie ne fait pas de ségrégation entre les espèces. Il n'y a pas la santé humaine d'un côté et la santé animale de l'autre. Il suffit de se rappeler d'où vient le mot vaccin. Il est dérivé du mot vaccine, qui désigne une maladie qui affecte les vaches. À la fin du XVIIIe siècle (et donc cent ans avant la géniale invention de Louis Pasteur de lutte contre la rage), un anatomiste anglais, dénommé Edward Jenner, avait découvert qu'en inoculant à petites doses cette maladie de vaches aux hommes, on protégeait ces derniers de la variole, dont les épidémies pouvaient décimer la moitié de la population d'une ville en un rien de temps. Restons-en bien persuadés : hommes et bêtes, nous sommes solidaires. En vivant tous dans le même monde fragile, nous dépendons les uns des autres. Nous avions un peu tendance à oublier cette évidence que ce foutu Covid est venu nous rappeler brutalement.